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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 janvier 1855.

L’année qui commence va-t-elle, pour premier gage, sourire à la fortune de l’Europe en lui rendant la paix. — une paix digne de ses efforts et de ses sacrifices ? l’acceptation par la Russie des dernières conditions délibérées à Vienne entre la France, l’Angleterre et l’Autriche sera-t-elle ce gage attendu du rétablissement prochain d’un ordre désormais plus fermement assis et plus durable ? Telle est la puissance de ce mot simple et magique, la paix, qu’il ne peut être prononcé sans faire vibrer toutes les espérances, sans rouvrir des perspectives d’activité et de sécurité aux intérêts en suspens. Le premier mouvement est d’accepter les symptômes favorables presque comme une réalité, de croire à la paix justement parce que la paix est un des besoins de la civilisation. On se rattache aux moindres indices, à une tentative de rapprochement, à une négociation renouée, comme à un présage certain. Le second mouvement est de se demander sur quoi se fonde cette croyance, quelle est la valeur de ces présages et de ces indices, et alors renaît une sorte de défiance instinctive que justifient trop par malheur les tactiques et les faux-fuyans par lesquels la Russie a cherché jusqu’ici beaucoup moins à entrer dans une négociation sérieuse qu’à faire tourner à son avantage chaque phase nouvelle de ce long et laborieux conflit. Qui ne se souvient de la déception universelle causée par l’étrange acceptation de la première note de Vienne ? On n’a point oublié aussi comment la Russie souscrivait, il y a plus de six mois, au protocole du 9 avril, et transformait en concession l’évacuation forcée des principautés. Plus récemment le cabinet de Petersbourg acceptait les garanties du 8 août en les annulant par ses interprétations. Au bout de chacune de ces démarches, qui s’expliquaient toutes par des motifs étrangers au désir sérieux de rétablir la paix, que trouvait-on en fin de compte ? On trouvait la Russie toujours sur le même terrain où elle s’était placée à l’origine de la question, élevant des prétentions identiques, qui