construction et l’ébénisterie. Il en est un qu’on appelle dans le pays beef wood, bois de bœuf, sans doute à cause de sa belle couleur rouge, qui sert aujourd’hui à faire des lattes pour couvrir les maisons, et qui peut lutter avec le plus bel acajou. La Guyane nous avait montré de son côté le bois de zèbre et le bois de tigre, dont les veines rappellent le pelage de ces divers animaux. M. Mac Arthur, auteur de la collection vraiment unique des bois australiens, en a fait don au Jardin des Plantes de Paris, où elle restera comme un monument de science et d’industrie. La terre de Van Dienem, satellite de l’Australie, a exposé des meubles d’un goût douteux, mais d’un riche travail, faits avec les principales essences du pays. C’était à n’en pas croire ses yeux.
Le cap de Bonne-Espérance, la Jamaïque, la Nouvelle-Zélande, l’île de Norfolk, Ceylan, l’Inde enfin, ont étalé à leur tour leurs trésors forestiers. Sans parler des produits spéciaux, comme les huiles, les résines, les farines nourrissantes, le caoutchouc et tant d’autres, qui nous viennent de ces arbres innombrables, leur bois seul a une grande valeur. Un petit échantillon de bois de teck, perdu dans la riche collection de l’Inde, n’était pas ce qu’elle renfermait de moins important. Ce bois passe pour incorruptible, et dans ce climat dévorant, il sert à faire des vaisseaux qui durent, dit-on, beaucoup plus que ceux d’Europe. L’arbre qui le produit est de la famille de nos verveines. Il commence à pénétrer en France ; on en fait des wagons de chemins de fer. Les Anglais l’emploient dans leurs constructions navales, bien qu’il puisse servir pour l’ébénisterie à cause de sa belle couleur jaune. On peut dire que la distinction entre le bois de construction et le bois d’ébénisterie s’efface tout à fait. L’acajou arrive maintenant en si grande quantité en Angleterre, qu’on s’en sert pour la marine. On en construit des bâtimens entiers. D’autres présentent une disposition particulière qu’on appelle bread and butter, pain et beurre, parce qu’elle se compose de couches superposées de bois différens. L’acajou de Honduras est plus léger que le chêne, bien qu’aussi solide, dit-on.
Devant cette brillante exhibition des nouveaux mondes, il semble que les bois de la vieille Europe dussent perdre beaucoup de leur intérêt. Il n’en est rien. Si magnifiques et si inépuisables qu’ils paraissent, ces dons de la nature primitive sont séparés de nous par l’immensité des mers, et bien qu’ils servent à se transporter eux-mêmes, puisqu’ils forment à la fois la coque et le chargement des navires, le voyage de matières si lourdes et si encombrantes ne peut être que très coûteux. La consommation s’accroît d’ailleurs très vite dans les pays de production et peut amener un jour une disette ou du moins une cherté. Les bois d’Europe ont donc toujours leur prix ;