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Nous ne pensons pas qu’il ait pu rien se passer de semblable. D’abord, en supposant que la Bavière ait eu réellement l’intention de faire une proposition de ce genre, et que la Prusse ait consenti à l’appuyer, il est pour le moins fort invraisemblable que l’Autriche, alliée des puissances occidentales, eût songé à prendre un rôle de médiation dans une affaire qui touche par un côté aux intérêts généraux de l’alliance, — à s’associera une démarche qui aurait eu aussi peu de chances d’être favorablement accueillie. On peut donc affirmer a priori qu’il n’y a point eu, qu’il n’a pu être proposé de médiation officieuse ou officielle entre les puissances occidentales et le roi Othon au sujet de la dernière crise ministérielle. Les cabinets de Paris et de Londres, tout en conseillant à ce prince de mettre les intérêts du pays et ceux de ses relations avec l’Angleterre et la France au-dessus de susceptibilités personnelles, se sont, sans aucun doute, abstenus avec soin de toute pression. C’est dans la pleine liberté de ses résolutions et sous sa responsabilité que sa majesté hellénique s’est séparée d’un cabinet qui offrait au pays et aux puissances des gages de sécurité. On manque encore de données certaines sur le personnel du nouveau ministère ; mais, quel qu’il soit, la France et l’Angleterre ont des devoirs à remplir envers elles-mêmes. Comme alliées de la Porte, elles ne peuvent pas admettre que le gouvernement grec sorte de la ligne de conduite qu’elles lui ont tracée en occupant le Pirée ; comme protectrices du royaume, elles ont incontestablement le droit de l’exiger. C’est un droit que la France, pour sa part, a payé environ cent millions depuis vingt-cinq ans.

Les troupes autrichiennes continuent à occuper les principautés. C’est un fait qui constate réellement l’alliance du cabinet devienne avec la Porte-Ottomane et les puissances occidentales. Il a donc pour nous sa valeur, et l’a eue surtout quand il s’est accompli ; mais peut-être n’a-t-il pas été non plus inutile à la Russie, dont il a rendu les forces plus disponibles pour défendre Sébastopol, puis, en désintéressant l’Allemagne, il a encouragé et créé le maintien de cette froide neutralité à laquelle la publique russe, faisant de nécessité vertu, bornait ses prétentions. Quoiqu’il en soit, l’état actuel des choses en Moldo-Valachie est un provisoire dont les deux provinces s’arrangent assez mal. Les Autrichiens ne s’y sont pas fait aimer. On leur trouve la main lourde, et les populations ne les voient pas sans défiance se mêler de tous leurs intérêts, peser sur l’administration, multiplier leurs rapports, et chercher à prendre racine dans le pays. On sent que pendant leur séjour il ne peut être pris aucune grande mesure, qu’aucune institution ne peut se fonder, qu’aucune amélioration considérable ne peut être sérieusement discutée. En effet, la coexistence de trois autorités, celle des princes qui sont rentrés en possession du gouvernement, celle des Autrichiens, et l’autorité de la Porte, dont on doit tenir un certain compte, est nécessairement une source féconde de tiraille mens qui paralysent la marche des affaires. Aussi les esprits sont-ils très agités à Bucharest et à Jassi, et le malaise va-t-il croissant à mesure que, le rétablissement de la paix devenant plus incertain, l’organisation définitive des principautés parait aussi s’éloigner davantage. On se demande donc s’il ne serait pas utile de donner dès à présent à la Moldo-Vaiachie et à la Servie, où la situation est également