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de petits pains anglais ne paraît avoir de luxe que le nom et le prix, car elle se compose d’une pâte faite avec la farine contenant le son de la mouture, quelquefois mélangée de farine de seigle; cette sorte de pain de son, douée d’une propriété légèrement laxative, est considérée comme rafraîchissante; on en fait généralement usage une ou deux fois la semaine à Londres.

Les variétés de petits pains de fantaisie sont plus nombreuses chez nous et se multiplient souvent au point de se confondre avec les produits de la pâtisserie. On compte au moins à Paris dix variétés de pains de luxe : ce sont d’abord les pains cubiques ou cylindriques, cuits en timbales afin que leur croûte soit plus mince et moins colorée, obtenus en imitant les procédés anglais, mais avec des perfectionnemens notables qui rendent ce produit plus léger et plus agréable au goût; il y a ensuite les pains à café[1], les pains viennois[2], etc. Une dernière forme de la fabrication du pain, celle qui se propose un but spécialement hygiénique, mérite surtout notre attention : nous voulons parler des pains de gluten. Lorsqu’on soumet au lavage avec précaution, et sous un mince filet d’eau, la pâte de farine de froment, l’eau entraîne les granules d’amidon et les substances solubles, tandis que le gluten, matière azotée contenant plusieurs principes immédiats, devenu adhésif, se réunit et s’agglomère en une masse très souple, extensible, élastique, offrant à un degré plus marqué les propriétés qui caractérisent la farine de blé et la distinguent des farines d’autres céréales dépourvues de gluten.

Cette simple opération analytique de laboratoire, réalisée plus économiquement sur une grande échelle, à l’aide d’un ingénieux ustensile, a permis d’extraire à la fois l’amidon, qui se dépose au sein des eaux de lavage, et le gluten, qui reste dans le vase à parois perméables. Tel est en substance le nouveau procédé salubre de l’amidonnerie, qui remplace l’ancienne et insalubre méthode, laquelle consistait à désagréger et dissoudre le gluten par voie de fermentation acide et putride, afin de mettre l’amidon en liberté.

  1. On les prépare avec la pâte ordinaire de belle farine ou même de farine de gruau blanc. On travaille cette pâte assez longtemps pour lui faire absorber plus d’eau et l’alléger davantage à l’aide d’une plus forte dose de levure. Mise d’ailleurs sous forme de cylindres courts, arrondis et accouplés, elle doit être saisie par la température du four de façon à se gonfler et à retenir sa forme avec une croûte assez solide. Cette sorte de petits pains légers, spongieux, est parfaitement appropriée à l’usage que l’on en fait pour absorber rapidement les liquides chauds, qui deviennent plus sapides eu raison des surfaces imprégnées.
  2. La composition des pains viennois diffère de celle des autres variétés par l’emploi, au lieu d’eau, d’un mélange de 1 partie de lait dans 3 parties d’eau pour former la pâte avec une proportion de levure aussi forte que dans les pains à café.