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ne lui permît pas de cumuler avec ce titre celui de secrétaire d’état des colonies. On conserva cependant le secrétaire à la guerre, et le duc de Newcastle et M. Sidney Herbert siégèrent ensemble dans le même conseil, sans qu’on ait jamais bien su comment les attributions étaient réparties entre eux. Probablement les décisions relatives à la guerre de Crimée étaient prises sur le rapport du secrétaire d’état, qui les transmettait ensuite à tous les départemens militaires, mais qui n’en dirigeait pas l’exécution. Cet arrangement, très imparfait, fut, comme on sait, un des motifs de la retraite inopinée de lord John Russell au mois de janvier dernier. Il voulait qu’au moins toutes les parties de l’administration militaire formassent un comité ou bureau dont le secrétaire d’état fût le chef responsable, et il faisait entendre que ce chef ne devait plus être le duc de Newcastle. On a souvent demandé que le personnage revêtu de ces fonctions fût à la fois un homme politique et un homme de guerre. Il y aurait à cela convenance plutôt que nécessité, puisqu’après tout dans la maritime Angleterre le premier lord de l’amirauté a cessé depuis bien longtemps d’être un marin; mais, sans insister sur la spécialité de la profession militaire, on ne devrait, au moins pendant la guerre, en donner le gouvernement qu’à un ministre prépondérant. A l’époque de la guerre de sept ans, Pitt, comme secrétaire d’état des affaires étrangères, se réserva tout ce qui concernait l’armée et les opérations militaires. Il n’admit dans sa confidence que son beau-frère, Temple, alors président du conseil, et l’Europe entière a cru Pitt premier ministre, quoiqu’un autre duc de Newcastle en portât alors le titre.

Lord Palmerston, en formant le cabinet actuel, a donc eu avant tout cette grande question à résoudre. Peut-être l’exemple de Pitt pouvait-il être suivi. L’opinion demandait un ministre de la guerre qui eût de l’activité et du commandement, surtout un caractère à briser tous les obstacles. Pour ce dernier motif, on eût accepté lord Ellenborough, quoiqu’il fût tory, ou lord Grey, quoiqu’il eût parlé pour la paix. Lord Palmerston appela lord Panmure, l’ancien secrétaire à la guerre des whigs. Ce dernier titre fut aboli, et toutes les attributions qu’il désignait passèrent de droit au secrétaire d’état. Lord Palmerston expliqua à la chambre des communes qu’on réunirait à ces attributions la partie civile de l’administration du maître général de l’ordonnance, qui abandonnerait également la discipline de l’artillerie et du génie au commandant en chef. Quant au partage à faire entre celui-ci et le ministre, on fut bref et vague. Il fut dit que, si d’autres changemens étaient jugés nécessaires, les horse guards seraient consultés dans les choses de leur compétence, mais que le ministre apprécierait le conseil et déciderait. L’unité n’a donc