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le rendement. MM. Fontaine, Braud et Froment ont un vannage à papillons, garni d’une bande annulaire en gutta-percha qui s’enroule sur deux cônes en fonte, dont les axes sont dirigés dans le même plan. MM. Tenbrinck et Dychkoff ont une turbine dont chaque directrice est garnie d’une vanne horizontale que l’on peut ouvrir et fermer à volonté. MM. Roy et Laurent ont une turbine à bâche fermée où le vannage s’effectue à l’aide de clapets. Toutes ces turbines reçoivent l’eau de haut en bas ; d’autres, comme celles de MM. Cousin frères et Canson d’Annonay, sont destinées à la recevoir dans un sens horizontal. MM. Cousin frères ont fait des emprunts heureux à tous les systèmes, et M. Canson s’est surtout proposé d’arriver à une moindre dépense dans l’appareil en en simplifiant, les combinaisons. Quant à l’industrie étrangère, elle n’avait qu’un représentant dans la turbine : c’est l’administration impériale des forges et usines de Jenbuch, dans leTyrol. L’appareil qu’elle a exposé est formé d’aubes courbes maintenues entre deux anneaux horizontaux. L’eau arrive à la roue par la tangente au moyen d’un canal rectangulaire, garni, près de la turbine, d’une vanne verticale. C’est un système peu connu en France, mais très répandu en Autriche et aux États-Unis ; on le doit au général Poncelet.

Les machines à vapeur sont un des titres les plus récens de l’industrie, et il était naturel de lui demander, dans une occasion aussi solennelle, où elle en est pour ces merveilleux et formidables engins. Ce n’est point là en effet un de ces problèmes au sujet desquels l’opinion publique peut rester indifférente. Que l’homme oisif, que la femme du monde s’inquiètent peu de savoir comment se tissent la toile qui les couvre, la soie qui les pard, cela se conçoit ; c’est du soin superflu, et pourvu qu’avec de l’argent ils aient de l’une et de l’autre, ils en sauront toujours assez. Mais ces terribles machines à vapeur, bon gré mal gré, il faut compter avec elles. Quand on les oublie, un bruit sinistre rappelle inopinément leur puissance : il s’agit de victimes écrasées ou brûlées à petit feu, de membres brisés, de crânes ouverts. Qui ne tressaillerait ? qui ne se tiendrait sur ses gardes ? qui n’éprouverait un respect mêlé de terreur, surtout quand la veille on a couru la même chance, ou qu’il faudra s’y exposer le lendemain ? Aussi peut-on, en toute confiance, parler de la machine à vapeur. Pût-on technique, employât-on les termes du métier, on serait encore assuré d’avoir un auditoire. Une bielle, un frein, un essieu, une chaudière, voilà des mots qui par eux-mêmes sont bien peu engageans et n’alimentent guère l’intérêt ; mais quand on se prend à réfléchir que la vie dépend d’un frein qui se brise, d’un essieu qui se fourvoie, d’une chaudière qui éclate, à l’instant ces mots prennent une autre valeur que celle du vocabulaire, et