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par les primats du pays, ainsi que cela se passait jadis à l’arrivée d’un commissaire extraordinaire.

Cette première impression était bonne et l’occasion bien choisie, car l’année, qui avait fait son entrée en Bosnie avec hésitation, et le corps réuni autour de Serajevo, qui avait jusqu’alors marché sans succès, avaient douté des talens de leur chef. Les soldats prirent courage dès qu’ils virent dans Omer-Pacha un homme sous les ordres duquel les combats pouvaient être glorieux. Cette attitude inspira également de la confiance aux chrétiens, qui commencèrent à croire à l’introduction du tanzimat, puisque la tâche de le faire exécuter était confiée à un chef qui bravait avec tant de dédain et de courage le vieux parti turc. Les beys et les pachas, installés dans le camp impérial, étaient profondément affligés et n’osaient pas relever la tête ; ils ne pouvaient tomber d’accord sur la conduite qu’ils devaient suivre, lorsque, trois jours après l’entrée d’Omer-Pacha dans Serajevo, arriva Rustem-Hafiz-Pacha, fils d’Ali-Pacha, gouverneur de l’Herzégovine. Il était chargé d’excuser son père et de le remplacer à l’assemblée des notables. C’était là le but avoué de sa mission, mais en même temps il venait annoncer en secret aux primats bosniaques que son père promettrait pour le moment d’introduire le tanzimat dans son gouvernement, et qu’il ne s’en préparait pas moins à expulser le corps d’occupation. Rustem-Hafiz-Pacha engagea les pachas et les beys à promettre de leur côté tout ce que le commissaire impérial leur demanderait ; on remettait à l’automne un soulèvement qui aurait pour résultat la destruction complète des troupes affaiblies des giaours. Omer-Pacha, blessé de l’absence d’Ali-Pacha Stolatchovitz et en pénétrant les motifs, n’accepta pas les excuses apportées par son fils et déclara à Rustem-Hafiz-Pacha qu’il considérait son absence comme un refus d’accepter le tanzimat. Rustem-Hafiz-Pacha dut donc écrire à son père de se rendre à Serajevo ; mais Ali-Pacha s’arrangea de manière à n’y arriver que deux jours après la promulgation du tanzimat et la prestation de serment qui la suivit. Cette promulgation n’eut lieu que le 2 août 1850, parce que l’absence d’un homme aussi considérable qu’Ali-Pacha avait retardé les opérations de l’assemblée. La lecture du tanzimat eut lieu avec beaucoup de solennité et de pompe religieuse, en présence d’Omer-Pacha, du nouveau gouverneur de la Bosnie, Hafiz-Pacha, de tous les pachas, beys et hauts fonctionnaires de la Bosnie, qui prêtèrent chacun entre les mains d’Omer-Pacha le serment d’observer fidèlement les principes du tanzimat. Après cette cérémonie, Omer prononça un discours qui, au dire d’un témoin oculaire, émut l’auditoire jusqu’aux larmes. Fazli-Pacha et Mahmoud-Pacha demandèrent l’autorisation de porter le tépélik (insigne de l’armée régulière),