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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 août 1855.

Les jours s’écoulent sans dissiper l’incertitude qui flotte sur les événemens. La diplomatie a fait son œuvre, et elle n’a point réussi ; elle a laissé échapper les fils de toutes ces négociations si laborieusement conduites pendant près de six mois. On ne saurait s’y tromper, la paix n’est débattue aujourd’hui ni dans les conférences publiques ni dans les conférences secrètes. Que reste-t-il donc ? Il reste la guerre seule, — la guerre étendue comme les frontières mêmes de la puissance avec laquelle l’Europe est en lutte, persévérante et énergique comme il faut l’attendre de pays tels que la France et l’Angleterre, proportionnée par ses moyens et sa grandeur à la cause pour laquelle elle a été entreprise. La guerre, elle est partout en ce moment : elle est dans la Baltique, où, après une attente prolongée, elle vient de se manifester par un coup imprévu, par le bombardement de Svéaborg, qui parait s’être accompli avec un entier succès. Elle semble se réveiller en Asie, où les armées russes ont repris leurs opérations contre les Turcs ; on dirait parfois qu’elle s’annonce de nouveau sur le Danube, où elle a commencé. Au milieu de ces diversions, la guerre se concentre surtout en Crimée, dans cette Chersonèse où la fortune de notre temps a jeté trois cent mille hommes pour vider la querelle du monde nouveau sur une terre illustrée de tous les souvenirs du monde antique. Encore, sur cette terre de Crimée, la guerre se concentre-t-elle principalement dans une seule opération. — Prendra-t-on Sébastopol ? Telle est la question qu’un journal russe livrait récemment aux commentaires de l’Europe, et on conçoit que cette question ne soit point résolue de la même manière à Saint-Pétersbourg ou à Paris et à Londres. Sébastopol sera pris, disent la France et l’Angleterre en s’affermissant dans leur confiance par ce qu’elles ont fait depuis une année bientôt. — Les alliés ont laissé passer le moment de prendre la ville, disent les Russes, et depuis