leur pardonnait pas de s’en être écartés, eussent-ils même guéri leurs malades. Cette loi était peu profitable aux progrès de la science, mais elle indique des connaissances assez précises, et c’est ce que témoignent aussi les livres de Moïse. Voici d’ailleurs sur quoi ces connaissances reposaient : on exposait les malades sur le grand chemin, et tous les passans étaient appelés à donner leur avis, à raconter comment ils avaient guéri des maladies analogues. Ces observations recueillies composaient une sorte de manuel. L’anatomie n’était pas inconnue, et les pharaons avaient ordonné des dissections. L’embaumement même contribuait à faire connaître les organes, et les momies prouvent, par l’excellent état de leurs membres et de leurs dents, le savoir et l’habileté des médecins qui les avaient soignées de leur vivant.
L’Égypte était civilisée depuis longtemps, lorsque les Pélasgiens mangeaient encore des glands dans les forêts, et c’est à elle, dit-on, que les Grecs ont emprunté leur civilisation. Esculape passait pour être venu de Memphis. La médecine fut là aussi exercée primitivement par les dieux avec l’intermédiaire des prêtres, et la science naquit de la nécessité de tromper les hommes. Orphée et les orphéons sont les plus célèbres des prêtres-médecins ; mais les Grecs ne pouvaient être civilisés à demi : leur esprit était libre, curieux, et en peu de temps l’art de guérir fit de grands progrès. Pline attribue à Orphée un livre perdu sur la botanique, Galion un ouvrage sur les médicamens ; on a même considéré la résurrection d’Eurydice comme un fait purement médical, et c’est à Musée, l’un des élèves d’Orphée, qu’Aristophane, dans les Grenouilles, attribue l’invention de la médecine et de la magie. Les prêtres grecs d’ailleurs ne prétendaient pas être seulement des intermédiaires chargés d’obtenir des dieux la guérison des malades ; ils disaient avoir reçu d’Apollon l’art de guérir. On ne sait rien pourtant de positif sur les médecins antérieurs, à Escalope, et l’érudition la plus hardie n’oserait ici rien affirmer. Esculape même, nous ne le connaissons que par ses fils Machaon et Podalire, qui ont assisté au siège de Troie, et la poésie d’Homère a fait de ces temps fabuleux une époque connue de tout le monde.
Machaon et Podalire soignaient les blessés de l’armée grecque. Leur thérapeutique était singulière ; on sait que l’un d’eux faisait boire aux blessés une mixtion de vin et de fromage râpé, et cependant un grand médecin comme lui, dit Homère, vaut mieux que des bataillons entiers dans une armée. Après le siège de Troie, un des fils de Machaon éleva un temple à son grand-père, Esculape, qui devint dès lors une divinité, quoique Homère l’appelle simplement le médecin irréprochable. Les temples d’Esculape se multiplièrent et furent bientôt remplis de prêtres-médecins. Les plus célèbres sont ceux de Titane près de Sicyone, de Tricca en Thessalie, de Tithorée