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insignifiante d’acide carbonique ; à sa sortie il a perdu beaucoup du premier gaz ; il a gagné du second : il a subi une altération semblable à celle que l’on observe au moment où il entretient la combustion du charbon. Ce charbon existe dans le sang ; il est brûlé par l’oxygène de l’air, et l’action chimique exercée au milieu du poumon est identique à celle qui se remarque dans les foyers. Or, si cette dernière développe de la chaleur, la première en produit nécessairement et en égale quantité. D’après Lavoisier, la machine animale est alors gouvernée par trois fonctions principales, la respiration, qui consomme de l’oxygène en le combinant avec les principes du sang et qui produit la chaleur ; la digestion, qui comble les vides creusés par la respiration, et l’exhalation, qui rétablit l’équilibre entre les deux premières actions.

Quand un homme de génie, et personne n’a mieux mérité ce titre que Lavoisier, établit une théorie générale, il est rare qu’il la complète ; il laisse à ses successeurs la tâche de la justifier dans ses détails et de la vérifier numériquement. Celle de Lavoisier, accueillie avec admiration, fut étudiée avec les soins qu’elle méritait ; la physiologie vint la modifier à son point de vue ; la physique et la chimie se chargèrent de mesurer à la fois les altérations chimiques de la respiration et la chaleur dégagée pendant qu’elle s’exerce. Il fallait démontrer que tout le développement calorifique occasionné par un animal quelconque est égal à celui que produirait la combustion des élémens qu’il consume. Dulong et M. Despretz se rencontrèrent encore sur ce terrain commun : les expériences de l’un se sont trouvées en tout point conformes à celles de l’autre.

Dulong fit construire une petite caisse métallique que l’on pouvait ouvrir et fermer par un couvercle hermétique ; on la garnissait d’un plancher d’osier, on y déposait l’animal que l’on voulait soumettre à l’observation, on l’y enfermait, et on plongeait la boite dans une cuve plus grande remplie d’eau. Dans cette espèce de cloche à plongeur, le patient respirait à l’aise, dégageait de la chaleur, échauffait l’eau dont il était entouré ; il était comme le foyer au milieu d’une chaudière, et la quantité de calorique qu’il produisait, absorbée intégralement par l’eau, se mesurait aisément par l’élévation de température qu’elle déterminait. Toutefois la gêne de l’animal se fût peu à peu augmentée et sa mort eût été certaine, si on n’eût pris le soin de renouveler à chaque moment l’atmosphère de la caisse. La respiration produit de l’acide carbonique ; ce gaz est vénéneux, et l’animal se fût empoisonné par ses propres exhalaisons. Aussi un gazomètre rempli d’une quantité mesurée d’air pur injectait continuellement ce gaz dans la boite, qui se vidait d’autre part dans un deuxième vase où elle versait peu à peu l’air vicié à mesure qu’il