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autre question bien différente : — comparer les chaleurs qu’il faut donner à diverses substances pour les échauffer d’un même nombre de degrés. Cette comparaison leur permet de calculer combien absorbent 400 grammes d’oxygène, 12 grammes d’hydrogène et un nombre de grammes de tous les autres corps simples égal à leurs poids atomiques. Ils arrivent ainsi à cette loi : tous les atomes des corps simples prennent autant de chaleur pour s’échauffer également.

Toutes les découvertes qui établissent une relation numérique bien constatée entre deux ordres de phénomènes jusqu’alors considérés comme indépendans les uns des autres sont les plus précieuses conquêtes que puissent faire les sciences. Outre la satisfaction immédiate de curiosité qu’elles procurent, elles deviennent les élémens de théories physiques qu’elles préparent et les bases de rapprochemens ou de généralisations dont elles font prévoir la possibilité. Dans l’ignorance où nous sommes sur la nature de ce mouvement intestin qui produit la chaleur, nous n’avons pour nous éclairer que les phénomènes par lesquels il se révèle, et nous ne pouvons qu’attendre le moment où l’expérience les aura tous étudiés et mesurés ; or nous venons d’apprendre que les atomes matériels interviennent d’une manière simple dans les actions calorifiques, et la relation que nous avons exprimée sera un jour une des données que l’on invoquera pour faire la théorie rationnelle de la chaleur : c’est à ce point de vue surtout qu’il faut la juger, plutôt comme une espérance que comme un fait accompli. En lisant le mémoire qui, sous un titre modeste, contient cette découverte importante, on devine à la fois le plaisir qu’elle causait aux inventeurs, la valeur qu’ils lui reconnaissaient et le désir qu’ils avaient de la faire apprécier. Également soucieux des faits et de l’expression, ils donnent à leur style une ampleur inusitée et une richesse qui n’exclut pas la précision des termes scientifiques. On sent que la pensée s’élève avec le sujet, et que des considérations plus générales prennent la place des préoccupations de détail. Ils discutent longuement les explications données avant eux sur le développement de la chaleur, montrent la nouvelle face sous laquelle se présente la question, et annoncent les divers travaux qu’ils vont exécuter pour compléter ce qu’ils ont si bien commencé. Ce programme malheureusement ne put être rempli. Ils lisaient leur mémoire à l’Académie des Sciences le 12 avril 1819, et une année après, le 29 juin 1820, Petit, à l’âge de vingt-neuf ans, fut emporté par une maladie de poitrine qui le consumait depuis longtemps. Arrêtons-nous ici un moment pour placer un mot sur la vie du savant à côté de l’appréciation de ses travaux.

Petit, né à Vesoul, s’était fait remarquer dès sa plus tendre jeunesse