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J’aurais voulu voir à l’exposition des chèvres du Mont-d’Or, près Lyon, dont on estime le produit brut annuel à 125 francs par tête. L’objection ordinaire contre la chèvre, c’est qu’elle détruit tout, mais on n’est nullement obligé à la laisser paître en liberté : celles du Mont-d’Or ne sortent jamais et elles ne s’en portent pas plus mal. Ces chèvres, bien nourries, donnent jusqu’à 600 litres de lait par an : la plupart de nos vaches n’en donnent pas autant et elles consomment beaucoup plus.

Après les chèvres venaient les lapins. Tout t le monde connaît le traité célèbre sur l’art de se faire avec les lapins 3,000 francs de revenu ; il faut croire que cette promesse n’est pas tout à fait illusoire, car il y avait à l’exposition trente familles de lapins dont trois ont été primées. On a raison de ne rien négliger, quand il s’agit de ce qui se mange. Je lisais, il y a quelque temps, dans un journal anglais, que l’élève des lapins était devenu, dans les environs d’Ostende, une industrie très lucrative, et que des milliers de ces animaux étaient embarqués régulièrement pour l’Angleterre. Je n’ai pas vérifié le fait. Ce qui est certain, c’est que dans tous les temps on a eu des garennes et des clapiers. Le vieil Olivier de Serres les recommandait vivement il y a deux siècles et demi. Je suis porté à croire qu’on pourrait les multiplier avec avantage. La grande objection est la mortalité, mais on peut y échapper en leur donnant plus d’air et d’espace qu’on ne le fait communément.

Une exposition d’oiseaux de basse-cour fermait la marche ; poules, canards, oies, dindons, faisans, pigeons et pintades de toute espèce, remplissaient environ cent cinquante cages. C’était encore une innovation, car dans les premiers concours on n’avait pas admis ces produits, qui, pour être modestes en apparence, n’en deviennent pas moins par leur nombre d’énormes richesses. J’estime à 200 millions par an le produit des œufs et des volailles en France, et je ne crois pas avoir exagéré. Ici seulement je regarde comme bien inutile l’importation de types étrangers. Rien dans le monde ne vaut nos volailles. Depuis quelques années, une variété nouvelle de poules dite cochinchinoise a fait assez de bruit, soit en France, soit en Angleterre, à cause de sa taille gigantesque ; mais peu à peu l’engouement diminue, et on revient aux anciennes races. La poule cochinchinoise peut avoir quelque mérite comme couveuse, elle peut servir à augmenter par des croisemens la taille des nôtres, mais elle est mal faite, et sa chair est inférieure. On parle aussi avec éloges de la poule anglaise dite de Dorkings, du nom d’un district du comté de Surrey, dont elle est originaire. Cette variété obtient maintenant tous les prix en Angleterre, le prince Albert en avait envoyé un très bel échantillon : je ne la crois pourtant ni supérieure ni même égale à notre poule de Crèvecœur, pas plus qu’à notre variété bressanne, à