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propre à la végétation de l’herbe sur les hauteurs. En revanche, les bas-fonds abondent en excellentes prairies qu’arrosent d’innombrables sources, et la terre s’y prête davantage à la culture des racines et des plantes fourragères. L’espèce bovine s’y trouve donc dans des conditions un peu différentes, mais qui ne seraient point inférieures en somme, sans deux circonstances fâcheuses, nées toutes deux de l’absence de débouchés : l’une est une culture de céréales beaucoup trop étendue pour la nature du sol, l’autre l’emploi presque général des vaches pour le travail. De là une diminution sensible, soit dans le nombre des bêtes bovines, soit dans leurs produits.

Les trois départemens que peuple la race limousine, la Haute-Vienne, la Creuse et la Corrèze, contiennent environ 400,000 têtes, c’est-à-dire un cinquième de moins que les trois départemens auvergnats. De plus, la race est plus petite, moins vigoureuse, nullement laitière, suite inévitable de l’excès de travail et de l’insuffisance de nourriture. Elle rachète ces défauts par une grande docilité et une bonne qualité de viande. Paris consomme à peu près tous les ans 20,000 bœufs limousins, dont les deux tiers lui arrivent directement du pays de provenance, et le reste après avoir passé par les herbages de la Vendée ou de la Normandie. C’est à peu près toute la production de la race en bœufs gras, car la contrée d’où elle vient n’est pas assez riche pour consommer beaucoup de viande, surtout de la viande de bœuf. Les limousins sont estimés sur le marché de Paris ; ils étaient représentés à l’exposition par dix animaux dont un taureau qui a eu le prix, même sur les salers. Leur pelage est couleur de blé.

À mon avis, rien n’est plus facile que de doubler ou de tripler la production de la viande en Limousin, même sans rien changer à la race. Il suffit de multiplier les irrigations, qui sont déjà parfaitement entendues, de mieux soigner les prés et surtout les pacages, qui sont en général abandonnés aux mauvaises herbes et aux eaux croupissantes, d’améliorer par des sarclages et autres soins le pâturage des terres incultes, d’étendre, considérablement la culture des racines et surtout des turneps, connue et pratiquée depuis un temps immémorial, de réduire le plus possible aux meilleures terres la culture des céréales, de diminuer d’autant le travail des bêtes et surtout des vaches, de mieux nourrir les élèves dans le jeune âge et de les faire moins vieillir sous le joug, enfin de s’attacher à bien choisir les reproducteurs qui présentent les formes les plus rondes et la peau la plus souple. Tout cela se fait déjà peu à peu et se fera naturellement de plus en plus, à mesure que la demande de viande pénétrera plus profondément.

Parmi les croisemens possibles, il en est quelques-uns assez en