Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 11.djvu/1306

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le printemps et deux beaux yeux entraînent mon cœur dans une nouvelle folie. Je crois que les roses et les rossignols sont profondément impliqués dans cette conspiration.

XII.

Ah ! je voudrais pleurer, pleurer des larmes d’amour, des larmes pleines d’amertume et de délices, et je crains qu’à la fin mon désir ne soit exaucé.

Ah ! la douce misère de l’amour, et la volupté amère de l’amour, je les sens qui se glissent, ô torture joyeuse ! dans mon âme à peine guérie.

XIII.

Les yeux bleus du printemps regardent du milieu de l’herbe : ce sont les chères violettes que j’ai cueillies pour en faire un bouquet.

Je les cueille, et je pense, et toutes les pensées qui soupirent dans le fond de mon cœur, le rossignol les chante tout haut.

Oui, ce que je pense, il le dit dans ses chants et avec des notes sonores qui retentissent au loin. Mon tendre secret, la forêt tout entière le sait déjà.

XIV.

Quand tu passes auprès de moi, quand ta robe m’effleure seulement, mon cœur bondit de joie et se précipite sur tes belles traces.

Alors tu te retournes, tu me regardes avec de grands yeux, et mon cœur est si effrayé, qu’il peut à peine te suivre.

XV.

La svelte fleur des eaux se balance rêveuse au milieu du lac ; l’astre des nuits la salue tout tremblant de langueur et de désir.

Confuse, elle incline sa tête vers les ondes ; soudain elle y voit à ses pieds son pauvre amoureux à la face blême.

XVI.

Si tu as de bons yeux, et que tu regardes dans mes chansons, tu y verras une jeune belle qui s’y promène de çà, de là.

Si tu as l’oreille fine, tu peux même entendre sa voix, et ses soupirs, son rire, son chant, affoleront ton pauvre cœur.

Avec les lueurs de son regard, avec le timbre de sa voix, elle te troublera comme moi-même, et, rêveur amoureux, tu t’en iras errant par la forêt printanière.

XVII.

Qui te fait errer ainsi dans les nuits de printemps ? Tu as rendu les fleurs folles. Les marguerites sont effarées, les roses sont rouges de honte, les lis