Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 11.djvu/1069

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’âge auquel est mort le bœuf sacré, et ces âges, très différens, ne cadrent en aucune façon avec le cycle.

Le beau travail entrepris par M. Biot l’a conduit en même temps à étudier la table d’influences des constellations pour toutes les heures de la nuit, et grâce à la traduction qu’en a donnée M. de Bougé, il a pu tirer de la mention du lever de chaque étoile la détermination des astérismes de notre sphère correspondant à ceux de la sphère égyptienne. Ce travail, exécuté avec une précision et une sagacité faites pour commander la conviction, nous prouve définitivement que les constellations des Égyptiens n’avaient rien de commun avec celles des Grecs, lesquels groupaient et dénommaient autrement les étoiles, en sorte que les derniers débris du système qui fait découler la mythologie des Grecs et le nom de leurs astérismes de l’Egypte sont définitivement réduits en poussière.

Nous n’entrerons point ici dans le détail de tous les efforts qui ont été tentés pour reconstruire une à une les dynasties égyptiennes; ce serait fatiguer le lecteur par une foule de noms peu familiers à son oreille, et que l’égyptologue transpose, change, promène incessamment, cherchant à faire accorder entre eux ces compartimens d’un grand jeu de patience proposé à l’amusement des érudits. Nous nous bornerons à esquisser les faits généraux. Il y a un événement capital qui domine toute l’histoire d’Egypte, et qui nous est révélé par Manéthon : c’est l’invasion des pasteurs ou Hyk-sos (en égyptien les chefs des pasteurs), irruption d’un peuple vraisemblablement de race sémitique qui scinde en deux l’histoire égyptienne et se place entre la treizième et la dix-huitième dynastie. Ces peuples, qui paraissent avoir dominé sur l’Egypte moyenne et la Basse-Egypte, tandis que la monarchie égyptienne se voyait reléguée dans la Thébaïde et l’Ethiopie, apportèrent sur la ferre des pharaons la barbarie et la destruction. Longtemps on chercha sur les monumens égyptiens la mention de ces Hyk-sos, dont le règne dévastateur s’annonçait cependant par l’absence de toute construction nouvelle à l’époque qui leur correspond. La lecture du papyrus n° 1 de la collection Sallier a révélé dernièrement à M. de Bougé une de ces mentions longtemps cherchées. Le papyrus s’est trouvé être un fragment d’une histoire de la guerre entreprise par le roi de la Thébaïde contre le roi pasteur Apapi. Cette guerre se termina sous Ahmosis, le monarque suivant, par l’expulsion des étrangers. Le même papyrus nous apprend que la capitale des pasteurs s’appelait Hanoua, nom dans lequel on reconnaît l’Avaris de Manéthon. Le roi de ces pasteurs est représenté comme l’ennemi des dieux de l’Egypte. L’inscription du tombeau d’Ahmès, à Élithyia, fixe la fin de cette guerre à la septième année du règne d’Ahmosis. Les cartouches des rois pasteurs ne se lisent sur la dédicace d’aucun monument. C’est là encore un indice de l’origine sémitique de ces conquérans étrangers, car le Sémite est l’enfant du désert et ne connaît que la tente. L’Africain qualifie en effet les Hyk-sos de Phéniciens (Φοίνιϰες ξένοι βασιλεῖς (Phoinikes xenoi basileis)).

Ainsi on peut diviser l’histoire pharaonique en deux périodes, — l’ancien empire et le nouveau : le nouveau, qui, d’après les synchronismes et les dates produites plus haut, ne saurait être plus récent que le XVIIe siècle avant notre ère; — l’ancien, qui commence à une époque inconnue, à cinq ou six mille