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ACHIM D’ARNIM

NOUVELLES ET ROMANS. — BETTINA ET LA GÜNDERODE.
Arnim’s Werke, herausgegeben von Wilhelm Grimm (Œuvres d’Arnim, publiées par Wilhelm Grimm), Berlin 1850. — II. Studien für eine Geschichte des Deutschen Geistes (Études pour servir à une histoire de l’esprit allemand), par Moriz Carrière, Leipzig 1851. — III. Die Günderode, von Bettina d’Arnim, Berlin.

Il y a dans un passé encore bien près de nous certaines physionomies intéressantes au plus haut point, et qu’il faut se hâter de saisir, de fixer, si nous ne voulons courir le risque de les voir à tout jamais disparaître. De droit, le présent nous attire, et ses tendances menacent d’absorber tout ce que nous avons dans l’esprit de forces vives. Réglons donc de notre mieux nos comptes avec le passé, et ne repoussons pas une occasion, quand il s’en présente, de mettre en lumière d’aimables noms autour desquels, dans leur propre pays, l’obscurité se fait déjà. Le vieux Goethe, avec sa haute clairvoyance, reconnaissait que dans le monde des esprits il y avait des formes et des aspirations en dehors de son domaine. C’est en ce sens qu’il appelait Beethoven une nature démoniaque, Beethoven, le maître par excellence de ces formes et de ces aspirations qui restèrent toujours des phénomènes incompris pour l’adorateur né de l’harmonie classique ! Si chez Goethe toute beauté ressort de l’union de l’esprit et de la nature, si chez Schiller l’esprit, en son élan irrésistible, entraîne trop souvent la nature, comment nier qu’il existe dans les profondeurs de la vie de l’âme un coin mystérieux où la nature à son