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gauche de l’Alabama à Montgomery, où se présentent deux lignes de steamers, l’une pour remonter vers le nord, l’autre pour descendre vers le golfe du Mexique jusqu’à Mobile, et de là gagner la Nouvelle-Orléans. De Baltimore à Halifax, sur les frontières de la Caroline du nord, on va par chemin de fer jusqu’à la cité fédérale de Washington, à 129 kilomètres de distance, puis on s’embarque sur le Potomac et on descend jusqu’à Fredericksburg dans la Virginie, où l’on rencontre un autre railway pour Halifax. De la même ville de Baltimore à Wilmington, vers l’extrémité méridionale de la Caroline du nord, on descend en steamer jusqu’à l’embouchure de la Chesapeake, où se trouve une ligne ferrée qui va rejoindre le great southern railway, aboutissant à Wilmington. De même de New-York à Cincinnati sur l’Ohio on parcourt 230 kilomètres en steamer par la route septentrionale, sur un trajet total de 1,379 kilomètres.

De la ville de Philadelphie à la cité de Pittsburg, séparées l’une de l’autre par une distance de 644 kilomètres, les wagons et les steamers se succèdent d’une façon plus pittoresque que partout ailleurs. La locomotive vous emporte d’abord de Philadelphie à Colombie durant un trajet de 132 kilomètres, puis on s’embarque sur un canal et l’on parcourt jusqu’à Holydaysburg 277 kilomètres ; on remonte en wagon jusqu’à Johnstown pendant 60 kilomètres, et il reste encore 167 kilomètres à faire en steamer. On a réussi à éviter les retards et les inconvéniens qui résulteraient de transbordemens aussi répétés. Les voyageurs prennent place sur les bateaux au point de départ même, dans l’intérieur de la ville de Philadelphie, et au moyen d’une combinaison ingénieuse ils n’éprouvent plus aucun dérangement jusqu’au point d’arrivée. Voici comment ou procède : les bateaux, dont la dimension est énorme, sont coupés pour ainsi dire en larges tranches, formant des compartimens tout à fait distincts. Ces tranches sont posées sur les trucks du chemin de fer et traînées par des chevaux sur des rails, à travers les rues de la ville, jusqu’à la station des machines dans un des faubourgs. Quand la locomotive a emporté ces fragmens sur la première section du trajet jusqu’au bord du premier canal, on les rattache rapidement les uns aux autres à l’avant et à l’arrière du corps de vaisseau, qui les attend avec son appareil mécanique, de manière à ne plus former qu’un tout. Lorsqu’il faut reprendre le chemin de fer, le steamer, est de nouveau dépecé et remis sur les trucks jusqu’au second canal[1].

Quelquefois les chemins de fer sont interrompus par de larges cours d’eau sur lesquels on ne pourra jamais ou du moins on n’a pas encore pu jeter des ponts. Les tronçons aboutissant à l’une et l’autre rive sont alors reliés ensemble au moyen d’un bac qu’on appelle ferry, et qui est habituellement desservi par des bateaux à vapeur ; steam-ferries. Ainsi, de Boston à New-York, la route est coupée par deux ferries ; de Philadelphie à Baltimore, on rencontre aussi un de ces bacs sur la Susquehannah. En pareil cas, on tâche

  1. Voyez Industrial Resources of the southern and western States, par M de Bow, professeur d’économie politique à l’université de la Louisiane. — Il faut dite que sur la plupart des points, à mesure que les chemins de fer se développent, on finit par avoir le choix entre le railway et le steamer ; mais alors les bateaux à vapeur luttent avec désavantage pour le transport des voyageurs contre les voies ferrées.