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grandes causes qui ont amené le dernier bouleversement. — En second lieu, il y a la période ou les époques géologiques, comprimant tous les changemens qui, à plusieurs reprises, ont bouleversé subitement là face du globe, déplacé les mers, remplacé en chaque localité la vie à ciel découvert par la vie sous-marine, et réciproquement, englouti des populations entières d’êtres vivans, végétaux et animaux, et laissé dans les entrailles de la terre, par la nature et la position des roches primitives et volcaniques, aussi bien que par les dépôts et stratifications postérieures et par les débris des êtres vivans à chaque âge de la terre, des monumens permanens dont l’inspection offre au géologue des hiéroglyphes bien autrement importans à déchiffrer que ceux de l’Égypte et de l’Assyrie. — La troisième et la plus ancienne époque de la nature est l’époque cosmogonique. La science qui traite de cette époque considère comment l’état de la terre, au commencement des âges géologiques, a pu être la suite d’une formation astronomique probable, d’où la terre et les planètes, comme la lune et les satellites, auraient tiré leur origine, elle remonte ainsi jusqu’au moment où les corps célestes qui peuplent le ciel par multitudes innombrables n’étaient encore qu’une matière chaotique disséminée dans l’univers, laquelle, sous l’influence des lois bien connues de la chaleur et de l’attraction, et avec l’aide de ce grand enfanteur de toutes choses, le temps, a donné naissance aux amas d’étoiles, aux soleils, aux planètes et aux satellites.

De ces trois âges du monde, — l’âge cosmogonique, l’âge géologique, l’âge historique, — le premier seul est ici l’objet de notre étude. C’est en prenant pour guide le génie de Laplace et ses déductions mathématiques que nous essaierons de soulever le voile que le temps et la nature ont jeté sur l’histoire primitive de notre planète. Tout a cédé au génie de l’homme, et ce « temps qui dévore tout ce qu’il crée, et ce passé envieux qui détruit comme le temps. »

Tempus edax rerumm, tuque, invidiosa vetustas,
Omnia destruitis…

Il serait injuste de ne pas placer en tête de toutes les cosmogonies celle qui se trouve au commencement des livres saints, et qui, depuis plusieurs années, a tant exercé la sagacité des théologiens et des savans, surtout de ceux du protestantisme. Partant de ce principe métaphysique, parfaitement infaillible, que deux vérités ne peuvent pas être en opposition, ils ont recherché avec soin la concordance des Écritures avec la géologie, et ils se sont appuyés des découvertes de celle-ci pour pénétrer le sens souvent obscur des expressions bibliques. On compterait par centaines le nombre des ouvrages théologiques ayant pour objet la concordance des quatre