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jour, au matin, « M. Biumy, capitaine au régiment de Sylva, fut blessé à la tête d’un coup de mousquet, dont il expira peu d’heures après, et M. de Saulx, enseigne dans le régiment de M. le comte de Solre, fut tué à la couronne. Après midi, M. Schoot, capitaine dans le régiment allemand de M. le baron de Mernich, y reçut aussi une blessure à la tête, qui lui causa la mort quelques jours après. Trente cavaliers, commandés par M. Sancto, capitaine, firent une sortie jusqu’au camp des ennemis, par Marly, où ils laissèrent quelques fantassins pour être soutenus dans leur retraite. Ils y tuèrent et blessèrent vingt Français. La fin principale de cette sortie était de faire passer un courrier avec des lettres d’importance[1]. » Ce jour-là aussi, le fils de Mme de Sévigné, allant avec sa compagnie de gendarmes-dauphin porter des fascines pour les travaux, eut le talon de sa botte emporté d’un coup de canon.

Le mardi 16, M. le maréchal de Schomberg et les officiers-généraux de la garde précédente furent relevés par M. le maréchal duc de La Feuillade; M. le comte de Montbron, lieutenant-général; M. Stoup, maréchal de camp; M. le marquis de Revel, brigadier de cavalerie; M. le marquis d’Uxelles, brigadier d’infanterie, et M. le prince d’Elbeuf, aide de camp du roi. Ce jour-là, on avança considérablement les batteries de mortiers; la tranchée, étendue en trois branches, environna complètement l’ouvrage qu’on voulait enlever, et l’on fit des places d’armes assez grandes pour mettre un bon corps de fantassins à couvert. L’infanterie ennemie tout entière se trouvait dans les dehors, la cavalerie restée en ville, où les bourgeois avaient relevé tous les postes. Un officier espagnol, déserteur, vint vers midi porter au camp français la nouvelle que la garnison de la place était tout à fait insuffisante pour son étendue. Cependant on n’attacha que peu de foi à ce rapport, qui parut suspect. — La ville, dit cet officier, est d’ailleurs abondamment pourvue de vivres et de munitions de toute espèce, et ne manque pas de pompes, qu’on emploie au mieux pour éteindre les incendies. — Un autre déserteur se rendit dans la soirée et rapporta que, la nuit précédente, le comte de Solre était parvenu à entrer dans Valenciennes en traversant l’inondation à la nage malgré le feu des fusiliers de l’armée royale, mais qu’ayant été pris par le froid il se mourait, et qu’on lui avait déjà porté le saint-sacrement[2]. « C’est, dit Pélisson, une belle action à ce seigneur, qui a déjà perdu Condé, et, comme on dit, plus

  1. Journal d’un bourgeois de Vallentiennes.
  2. On lit dans le Journal d’un bourgeois de Vallentiennes : « Le 8, à deux heures du matin, M. le comte de Solre, colonel du régiment d’infanterie de ce nom, accompagné d’un enseigne et de deux guides, entra dans la ville après avoir franchi les prairies mondées malgré l’extrême froidure de la nuit. »