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officier auprès de lui; il l’informe du malheur de sa famille, lui ordonne de partir aussitôt afin d’aller consoler son vieux père, et, pour première consolation, lui assure la survivance qui vient de devenir disponible par la mort de son frère. Le jeune homme tombe aux pieds du roi et s’écrie : « Sire, dans quelque état que je serve votre majesté, elle ne peut pas vouloir que j’y entre déshonoré ! » Louis XIV applaudit à ce noble sentiment, et Nicolaï, déjà premier président en herbe, fut le second, dit-on, qui entra en ville à l’assaut mémorable du 17, où il se couvrit de gloire[1].


II.

Après en avoir mûrement délibéré, il avait été décidé qu’afin d’enlever la couronne devant la porte d’Anzin, on embrasserait l’ouvrage par trois attaques. Celle de droite fut confiée à deux bataillons des gardes-françaises, celle de gauche à Picardie; enfin on relia ces deux attaques par une troisième, composée du 3e bataillon des gardes, mais cette attaque était fausse. Les parallèles et les boyaux de communication furent tracés pour cet objet.

Le roi plaça son quartier en avant de Famars, sur la rive gauche de la Rhonelle. Valenciennes était investie complètement, d’un côté par M. de Luxembourg à la rive gauche de l’Escaut, de l’autre par les troupes de M. de Montai à la rive droite; le corps du maréchal avait sa gauche à Saint-Saulve, le centre à Anzin, et la droite appuyée à l’Escaut, en avant de Saint-Léger. Le comte de Montal, à cheval sur la route de Mons, s’étendait de Saint-Saulve à l’Escaut, en contournant la ville, passant par Marly et se joignant par sa gauche aux quartiers du roi. Les corps des maréchaux d’Humières et de La Feuillade étaient établis autour de Famars. M. d’Humières, après son investissement simulé de la place de Mons, qui avait parfaitement réussi, était venu rallier l’armée royale le 11; il avait un fils qui servait dans les mousquetaires. Le maréchal de Schomberg était cantonné à Saint-Saulve, le maréchal de Lorges à Anzin. Le roi fit faire des ponts pour communiquer d’un quartier à l’autre. Cela n’était pas sans difficultés à cause des inondations de la Rhonelle et de l’Escaut. Quoiqu’il y eût beaucoup de neige et de glace sur la terre, il était continuellement à cheval, et par son exemple apprenait à ses troupes à mépriser les fatigues et les rigueurs de la saison.

C’est à l’entrée de la nuit du 9 au 10 qu’on ouvrit la tranchée. « Il est difficile d’ajouter quelque chose, dit un écrivain du temps,

  1. Celui qu’on reconnaît pour y être entré le premier est aussi un mousquetaire noir, le jeune de Beauvau de la branche de Tigny.