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Nerval. Le souvenir de Sylvie est encore trop récent pour qu’il soit besoin de le raviver.

Après avoir rappelé les efforts souvent heureux de Charles de Bernard et de Mme Reybaud, qui ont montré dans la Femme de quarante ans et dans Misé Brun un véritable talent de narration, il me reste, pour épuiser la liste des romanciers, à parler de trois hommes qui avaient reçu du ciel des dons précieux, mais qui les ont prodigués, oubliant l’art pour l’industrie : le lecteur a déjà nommé Frédéric Soulié, Eugène Sue et Alexandre Dumas. Oui, sans doute, chacun de ces trois écrivains possède un secret que personne ne peut lui contester, le secret d’intéresser, de nouer fortement une fable, de multiplier les incidens, d’animer les personnages; mais qui oserait soutenir qu’ils n’ont pas abusé de leur puissance? A coup sûr, les Mémoires du Diable ne sont pas l’œuvre d’un esprit vulgaire. Il y a dans l’enchevêtrement des épisodes, dans la rapidité du dialogue, quelque chose qui n’appartient pas au premier venu; mais c’est un livre conçu à la hâte, écrit au pas de course, et qui renferme bien des pages inutiles. L’auteur le savait bien, et ne s’estimait pas au-dessus de sa valeur. Le besoin, l’habitude de produire sans relâche, lui interdisaient les travaux qui demandent du temps et de la réflexion.

Les Mystères de Paris et le Juif errant, qui ont tenu en haleine pendant quelques mois la curiosité parisienne, attestent chez l’auteur une rare aptitude pour l’observation, mais en même temps une propension marquée pour les procédés les plus vulgaires de composition. Dans ces deux livres, dont quelques chapitres se recommandent par la vigueur du pinceau, les épisodes se suivent sans jamais être engendrés l’un par l’autre; ils ne portent jamais le caractère de la nécessité, ce qui est un grave défaut pour tous les esprits sensés. Ici d’ailleurs, comme dans les Parens pauvres, nous retrouvons un amour immodéré de la fange. Malgré l’avis de Nicolas Boileau, je ne pense pas que l’art puisse tout ennoblir. Balzac et Eugène Sue ont pris trop à la lettre l’arrêt prononcé par le législateur de notre poésie. Il y a des choses hideuses qu’il faut laisser dans le domaine de la réalité, et qui ne valent pas la peine d’être imitées, car le talent le plus vigoureux ne réussit pas à leur donner droit de cité dans le domaine de l’art.

Monte-Cristo et les Mousquetaires, qui ont enchanté tous les oisifs de notre temps, et qui révèlent à coup sûr une merveilleuse puissance d’invention, méritent à peu près les mêmes reproches que les Mystères de Paris et le Juif errant. Ils blessent en effet les esprits délicats par l’emploi de procédés vulgaires. Ils amusent, et c’est un grand point sans doute, mais il reste à savoir comment l’auteur s’y prend pour nous amuser. Or il faut bien avouer qu’il ne se montre