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emploierait encore plus de navires que celle du cap de Bonne-Espérance, et elle fournirait de plus habiles marins.

C’est donner trop d’importance à ces objections. Qu’il soit bien établi d’ailleurs que le canal maritime de Suez est praticable, qu’il facilitera et abrégera les relations avec l’Inde, que cette grande œuvre peut être exécutée dans des limites de temps et de dépenses abordables,, et l’esprit public, si puissant en Angleterre, aura bientôt fait justice des oppositions intéressées et des objections surannées.


XI. — RÉSUMÉ ET CONCLUSION.

Les faits et les conséquences qui résultent de l’exposé qui précède peuvent se résumer en peu de mots.

Un canal à régime intermittent et à faible tirant d’eau a été ouvert à plusieurs reprises entre le Nil et la Mer-Rouge, soit dans l’antiquité, soit dans le moyen âge.

Les projets pour la canalisation de l’isthme établis sur les données erronées de 1799 ne s’appliquaient également qu’à des canaux de petite et tout au plus de moyenne navigation.

La différence de niveau entre les deux mers,, qui, d’après les nivellemens de 1799, aurait été de près de 8 mètres, n’existe pas. Les basses mers sont de niveau, et la différence de 80 centimètres qui existe entre les mers moyennes provient uniquement de l’inégalité des marées.

La cote du zéro du meqyas du Caire, qui, d’après les nivellemens de 1799, n’aurait été que de 5m29, est en réalité de 13m27.

Le projet de coupure de l’isthme par la voie la plus courte, de Suez à Tineh, serait d’une exécution facile; mais le maintien de l’embouchure du canal et l’exécution d’un port et d’une rade abritée sur la plage de Tineh présentent des difficultés dont la solution eût été douteuse, même, avec la hauteur qu’attribuaient à la Mer-Rouge les nivellemens de 1799, et qui deviennent absolument insurmontables dès qu’il est constaté que les deux mers sont à. peu près de niveau.

Le seul projet praticable pour la réunion des deux mers consiste à joindre Suez et Alexandrie par un canal à deux versans, dont le point de partage est placé en amont du Delta. Si l’on s’en tenait à un tirant d’eau de 3 mètres, un canal de moins de 400 kilomètres de longueur franchissant une hauteur totale de moins de 20 mètres serait une œuvre des plus ordinaires; mais l’adoption d’une profondeur de 8 mètres, nécessaire pour les grands navires, augmente de beaucoup la dépense, et exige pour la traversée du Nil des ouvrages tout à fait hors ligne, dont l’exécution présente des