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M. Linant pense que des chasses, quelle qu’en fût l’énergie, ne pourraient suffire à ouvrir une passe qui, vu la faible inclinaison de la plage, ne saurait avoir moins de 7 ou 8 kilomètres de longueur; il croit au contraire que le grand courant d’eau claire, déversant par l’embouchure du nouveau bosphore, produirait infailliblement ce résultat. Il propose, pour assurer l’entrée du canal et pour le protéger contre les dépôts du Nil poussés par le courant littoral, l’exécution, à l’ouest de la passe, d’une jetée qu’on pousserait le plus loin possible, et qui, selon lui, suffirait pour assurer en tout temps aux bâtimens la possibilité d’aborder la passe directement et sans mouiller. Le lac Timsah, dans ce projet, deviendrait un grand port naturel. Quant à l’entrée de la Mer-Rouge, M. Linant suppose que la vitesse du courant versant de cette mer dans le canal, aidée par l’action de dragues convenablement employées, suffirait pour l’approfondir et la rendre praticable aux navires.


VIII. — ÉTUDES DE 1847.

Les divers projets que nous venons d’indiquer étaient restés dans le domaine des spéculations théoriques, et rien n’annonçait qu’ils dussent en sortir de longtemps, lorsqu’en 18A6, sur l’initiative de M. P. Enfantin, qui, depuis vingt ans, n’a cessé d’appeler par tous les moyens l’attention publique sur cette grande question, une société s’est formée dans l’intention de réunir enfin par des études rigoureuses et complètes les élémens d’une solution. Cette société, composée de trois groupes, allemand, anglais et français, se composait principalement d’hommes de ces trois nations voués à l’industrie. Trois ingénieurs membres de l’a société, MM. Robert Stephenson, Negrelli et Paulin Talabot, furent chargés de la direction des études et se partagèrent le travail. MM. Stephenson et Negrelli se chargèrent des opérations à exécuter dans la Mer-Rouge et dans la Méditerranée, l’ingénieur français de celles qui concernent l’isthme.

Dès le 30 avril 1847, une brigade d’ingénieurs allemands, munis de tous les instrumens nécessaires, s’établissait dans la baie de Tineh, et employait près de trois mois à faire de cette baie une étude approfondie.

Les travaux topographiques exécutés dans la Mer-Rouge par les soins de l’amirauté anglaise suffisaient pour le moment, et l’étude détaillée de la rade de Suez fut en conséquence ajournée.

De mon côté, je m’occupai immédiatement de réunir le personnel et de préparer les instructions accessoires pour les opérations dont j’étais chargé. Le défaut de vérification des opérations de 1799, les circonstances dans lesquelles elles avaient été exécutées étaient de