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se transforme en un papillon qui ne prendra aucun aliment, qui n’a même pas de trompe, et dont la vie de quelques jours est entièrement remplie par les actes et les soins qu’exigé l’avenir d’une génération nouvelle.

L’immense majorité des insectes s’écarte à des degrés divers de ce type absolu. Parvenus à leur dernier état, la plupart ont encore à entretenir, parfois à compléter leur organisation, et ceux-là doivent se nourrir. Plusieurs, au moment de l’éclosion, ont déjà la forme extérieure qu’ils garderont toute leur vie, et comme les mammifères ils n’ont plus qu’à grandir. D’autres n’acquièrent jamais d’ailes. Néanmoins ces variations sont loin d’être sans limites. Quelques caractères persistent avec une constance qui révèle ce qu’ils ont de fondamental. Tout insecte adulte est divisé en tête, thorax et abdomen; toujours il respire par des trachées, toujours il a pour marcher trois paires de pattes. Le point de vue où nous sommes placés nous permet d’ailleurs d’embrasser l’ensemble de ces différences et de ces rapports en les rattachant à de simples modifications d’un même phénomène.

Avec tous les entomologistes, nous admettons que les métamorphoses peuvent être complètes ou incomplètes. On regarde généralement les premières comme suffisamment caractérisées par la succession bien tranchée de trois états correspondant à ceux de chenille, de chrysalide et de papillon, et qui portent les noms plus généraux de larve, de nymphe ou pupe, et d’insecte parfait; mais, prenant pour terme de comparaison notre type virtuel, nous verrons que, tout en passant par ces trois états, un insecte peut néanmoins manquer de l’un des caractères essentiels déjà indiqués. Chez lui, la dernière transformation peut être comme enrayée sur un point, et par conséquent en réalité la métamorphose n’est pas complète. Il y a là en quelque sorte une transition aux espèces dont les changemens sont successifs, peu marqués ou même nuls. Partant de ces données, nous ne considérerons comme insectes à métamorphoses complètes que les coléoptères, vulgairement appelés scarabées; les névroptères, groupe qui comprend les libellules ou demoiselles, les éphémères, les termites, etc. ; les hyménoptères, dont font partie les abeilles, les guêpes, les bourdons, etc. ; enfin les lépidoptères. Nous avons parlé de ces derniers; passons rapidement les autres ordres en revue, en comparant les faits les plus saillans de leur histoire aux détails exposés plus haut[1].

Prenons d’abord les coléoptères, et parmi eux le hanneton. — Vers

  1. Les métamorphoses ne s’accomplissent pas toujours de la même manière dans les divers ordres dont il va être question. Ce phénomène présente souvent d’un groupe secondaire à l’autre de grandes différences, et des exceptions dans un même groupe de borner mes exemples j’ai choisi des espèces dont les transformations peuvent, autant que possible, servir de type, ou bien qui présentent des faits dont j’aurai plus tard à faire l’application; ainsi, au moins dans les détails, ce qui va suivre n’a rien d’absolu.