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les précédens. Cette espèce de négligence tient peut-être à l’extrême simplicité du premier autant qu’à l’extrême complication du second. Dans notre chenille comme chez tous les insectes, la circulation est presque entièrement lacunaire. Chez elle comme chez le papillon, le cœur seul existe, ou mieux est représenté par un long canal divisé en plusieurs chambres et étendu d’une extrémité à l’autre du corps. Quand celui-ci se raccourcit, il en est nécessairement de même pour le vaisseau dorsal, qui doit en outre]devenir de plus en plus sinueux à mesure que les régions du corps se prononcent et se séparent davantage. Cette dégradation des organes de circulation est compensée par le développement et la diffusion des organes respiratoires. Ceux-ci portent le nom de trachées; ils communiquent avec le dehors par les stigmates dont nous avons parlé, et consistent sans doute, dans notre chenille comme dans toutes les autres, en deux grands troncs latéraux allant d’un bout à l’autre du corps et donnant naissance à une multitude infinie de branches, de rameaux, de minuscules qui atteignent partout, pénètrent dans les moindres cavités et tapissent les organes les plus ténus. Dans tous les insectes qui volent arrivés à l’état parfait, et par conséquent dans le papillon de notre piéride, cet appareil se complique en outre de grandes poches aériennes qui donnent au corps plus de légèreté. D’après les observations de Newport, c’est chez la chrysalide seulement que ces poches naissent et grandissent avec une rapidité proportionnelle à celle du développement général[1]. Elles doivent donc, chez la piéride, commencer à paraître au moment de la métamorphose, se former à moitié avant l’hiver, demeurer stationnaires pendant cette saison, et n’acquérir leurs dimensions définitives que peu de temps et même après la dernière métamorphose.

Les appareils dont nous avons parlé jusqu’ici ont tous pour fonction d’assurer la conservation de l’individu. Aussi, au moment où l’insecte sort de l’œuf, tous sont prêts à entrer en exercice. Il n’en est pas de même des organes destinés à assurer la conservation de l’espèce. Tant que la piéride est à l’état de chenille, ceux-ci sont tellement peu développés, tellement méconnaissables, qu’il a fallu les recherches les plus approfondies d’Hérold pour en démontrer l’existence. Cinq mois encore après la transformation en chrysalide, ces organes sont entièrement rudimentaires. Ce n’est qu’au dernier moment, et lorsque le papillon est sur le point de paraître, qu’ils commencent à se caractériser par leurs produits, et dans l’insecte parfait seulement ils acquièrent leur développement entier. Ainsi cet appareil, qui à l’état complet caractérise, chez les vertébrés et les oiseaux

  1. On the respiration of insects. — Philosophical transactions, 1836.