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Dans la chenille de notre piéride, qu’elle vienne de sortir de l’œuf ou qu’elle soit prête à se transformer, l’appareil digestif est assez simple. Le canal alimentaire commence par un œsophage très court et très large; il se termine par un intestin qui présente les mêmes caractères, et que l’on a quelque peine à diviser en deux régions. Entre les deux se trouve un estomac proportionnellement énorme, cylindrique, occupant à lui seul la plus grande partie de l’intérieur du corps. À ces organes principaux se rattachent en avant deux glandes salivaires, en forme de tubes longs et entortillés, en arrière six canaux biliaires très développés qui représentent le foie. On voit en outre aboutir dans la bouche et à la filière dont nous avons parlé plus haut deux organes semblables à des manchons, sinueux, étendus jusqu’en arrière le long de l’estomac, et qui sont charges de sécréter la soie. On voit que tout dans cet appareil est disposé de façon à extraire les sucs nourriciers de grandes masses d’alimens peu substantiels et à peine préparés par une grossière mastication.

Aussitôt après que la chenille s’est métamorphosée en chrysalide, changemens se manifestent; dès le second jour, ils sont considérables. L’œsophage s’est rétréci et allongé; l’intestin, en se modifiant de la morne manière, s’est partagé nettement en deux régions ; l’estomac a perdu près d’un quart de sa longueur et au moins moitié de son diamètre; les glandes salivaires, les cœcum biliaires commencent à se raccourcir; les organes sécréteurs de la soie diminuent. Au huitième jour, l’ensemble du tube digestif rappelle exactement un fuseau de fileuse à demi garni de fil et chargé du plomb destiné à le lester. L’œsophage représente le haut de ce fuseau; 1’estomac répond au fil enroulé, l’intestin grêle à la queue du fuseau, et le gros intestin au plomb. En même temps les glandes salivaires, les cœcum biliaires se sont réduits des deux tiers, et les canaux sécréteurs de la soie ressemblent à deux fils très grêles. Tant que dure l’hivernage, c’est-à-dire pendant cinq ou six mois, le travail modificateur est suspendu; mais il recommence avec les beaux jours, et se prolonge jusque chez l’insecte arrivé à l’état parfait. Bientôt les canaux soyeux ont totalement disparu; les glandes salivaires n’existent plus qu’en vestige; l’estomac, tout en conservant sa dernière forme, a encore diminué, mais en revanche il s’est formé une poche nouvelle, le jabot, tour à tour destinée à faciliter la succion et à mettre en réserve les liquides sucrés recueillis par cet acte. En outre, les deux régions intestinales se sont de plus en plus accusées, et le gros intestin a gagné une poche accessoire qui n’existait pas auparavant.

Passons au système nerveux. Chez les annelés en général et par conséquent chez les insectes à tout état, cet appareil est formé de deux parties principales. Dans la tête, au-dessus de l’œsophage, se trouve le cerveau. Dans le reste du corps, d’autres masses nerveuses