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Christ, remplit tout le champ de la coupole. Sur les pendentifs sont représentés les quatre évangélistes et les quatre saints protecteurs de l’église. Dans la tribune se trouvait figuré le Couronnement de la Vierge; mais cette partie de l’église ayant été abattue pour l’agrandissement du chœur, la Vierge et le Christ furent heureusement sauvés, et sont aujourd’hui placés dans la bibliothèque de Parme. La décoration de la tribune nouvelle fut confiée au pinceau d’Aretusi. Je ne m’arrêterai pas à louer l’expression fervente des apôtres suivant d’un regard ébloui le Christ qui remonte au ciel. Je n’appellerai pas l’attention sur les myriades d’anges qui encadrent cette dernière scène. Ce qui me frappe, ce qui me paraît un éternel sujet d’admiration et d’étude, c’est le style des évangélistes et des saints protecteurs; c’est là que le génie d’Antonio se révèle dans toute sa puissance, dans toute sa maturité. Ces huit figures sont à mes yeux la partie capitale de la composition. Si le temps nous les eût enviées, nous n’aurions des facultés d’Antonio qu’une notion très incomplète. Si l’Ascension était ruinée, cette perte, si regrettable qu’elle fût, ne laisserait pas dans l’histoire de la peinture une lacune aussi affligeante. L’attitude des apôtres exprime admirablement le caractère du prodige dont ils sont témoins. Les chérubins et les séraphins sont à bon droit réputés comme l’expression la plus vraie de l’allégresse; mais le Christ, c’est-à-dire le personnage principal, n’a peut-être pas toute la grandeur, toute la sérénité dont l’imagination et la foi se plaisent à le revêtir. Il semble qu’en peignant cette figure, Antonio n’ait eu d’autre préoccupation que la perspective verticale. Tous les hommes du métier reconnaissent d’une voix unanime qu’il a résolu victorieusement ce problème difficile. C’est là sans doute un glorieux éloge. Cependant la difficulté vaincue ne saurait être acceptée comme le but suprême de la peinture. Aussi l’Ascension du Christ de San-Giovanni me parait-elle plus digne d’étonnement que d’admiration.

A ne considérer que la question de géométrie descriptive, c’est une merveille; si l’on oublie la science pour ne songer qu’à la beauté, la surprise fait place au désappointement. On regrette de ne pas trouver dans le fils de Marie le caractère surnaturel qui lui appartient : ce n’est plus qu’un homme ordinaire vu de bas en haut. Les apôtres et les saints protecteurs défient l’examen le plus attentif. Plus on les étudie, plus on est forcé de les admirer. Toutes les parties de ces étonnantes figures sont traitées avec le même soin, rendues avec la même vérité. Les têtes se recommandent par une physionomie originale, les pieds et les mains sont modelés avec une fermeté magistrale; quant aux draperies, elles sont bien conçues et n’ont rien de capricieux; elles plaisent aux yeux par le choix et la vérité des plis, et contentent l’intelligence en expliquant la forme