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des propriétés de la lumière qui ne se retrouve dans la chaleur. Malheureusement Melloni paraît avoir été absorbé par le soin des détails plus qu’il n’était attiré par les généralisations des principes.

Les travaux que nous venons d’énumérer avaient cependant obtenu leur récompense. Les plus illustres académies s’étaient associé Melloni. Son appareil était dans toutes les collections, ses découvertes étaient enseignées dans tous les cours de physique. Il ne manquait rien à sa gloire, et bientôt rien ne manqua plus à son bonheur : il fut rappelé en Italie, non comme un exilé que l’on amnistie, mais comme un enfant célèbre que sa patrie réclame. Il professa à l’université de Naples, et ne cessa de continuer ses travaux par une suite de mémoires instructifs. Il voulut les résumer tous et laisser un monument de ses œuvres. Il publia la Thermochrose. Il écrivit cet ouvrage en français, et c’était peut-être une marque de reconnaissance pour un pays qui l’avait longtemps adopté. On regrette, en lisant ce livre, une trop grande prolixité. La science a besoin d’être développée, mais elle ne gagne rien à se noyer dans des longueurs qui la dissimulent : elle demande les détails qui la complètent, elle repousse ceux qui sont inutiles à son but. Peut-être aussi eût-on été en droit de demander à Melloni un résumé plus complet des recherches qui avaient précédé les siennes. L’auteur a trop parlé de lui-même et trop peu des autres.

C’est au milieu de cette période plus calme de sa vie que des préoccupations étrangères à la science vinrent encore assaillir Melloni. De nouveaux orages politiques troublèrent ses dernières années, comme ils avaient agité sa jeunesse : il fut une seconde fois privé de sa chaire, vécut plus retiré, et ne s’occupait plus que de compléter la publication de son ouvrage, dont la première partie seulement avait paru; mais cette tâche ne fut point achevée, il fut emporté à Naples par l’épidémie dont nous sortons à peine.

Le moment est venu maintenant de résumer cette étude sur la vie et les travaux de Melloni, et je me rappelle involontairement les graves paroles que j’ai déjà citées : « Il est toujours périlleux de vouloir fixer la part des inventeurs dans une science qui marche. » L’opinion publique toutefois a déjà marqué cette part en ce qui touche Melloni, et nous essaierons de préciser ses jugemens.

La lecture des mémoires de Melloni laisse croire aisément que les travaux exécutés par ses devanciers étaient de faible portée. Elle apprend, il est vrai, qu’Herschel avait découvert les rayons obscurs du spectre, qu’il avait trouvé le maximum de chaleur auprès du rouge, que Delaroche avait fait une expérience intéressante; mais elle laisse ignorer les vues générales d’Herschel, toutes ses expériences sur la transmission et toutes ses discussions sur la théorie de la chaleur.