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REVUE DES DEUX MONDES.

le parti de César. Les mots ne changent point d’acception au gré de ceux qui s’en servent, et la phrase de M. Lenormant ne veut rien dire autre chose, sinon que dans la Grèce il est probable, non pas comme le dit M. Lenormant, qu’un grand nombre de traditions ont dû passer dans le domaine de la comédie, mais dans le parti politique de la comédie.

« 4o Debuisse transire. — Debuisse ne signifie pas ont dû, mais auraient dû ; debere se prenant toujours dans le sens de l’obligation, et jamais dans celui de la probabilité.

« On le voit, la plus amère critique que M. Lenormant pouvait faire du latin de sa thèse, c’est la citation textuelle et la traduction qu’il en a donnée dans sa lettre. Aucun mot n’est pris dans l’acception qu’il a réellement, et nous demanderons à tous les lecteurs de bonne foi si de pareilles conditions sont bien favorables à l’épigraphie latine, à la numismatique latine, à l’archéologie latine. M. Lenormant ayant cru devoir nous avertir, nous nous croyons autorisé à user à son égard de la même liberté, et nous l’engageons, dans le cours des études variées auxquelles l’obligent ses nombreuses fonctions, à se montrer prudent et à se souvenir qu’il n’a point, ainsi qu’il le dit lui-même, la prétention d’être un habile latiniste.

Charles Louandre. »


Nos lecteurs viennent comme nous d’assister à cette passe du néo-latinisme. Pour la résumer et être justes envers tout le monde, même envers nos compositeurs, qui pourraient se plaindre à leur tour, nous dirons d’abord qu’il est très possible qu’ils ne soient pas étrangers aux fautes d’impression qui ont donné lieu à la double réclamation qu’on vient de lire ; mais il n’est pas moins vrai que l’auteur reçoit des épreuves pour corriger ces fautes et contrôler ses citations. Pourquoi ne l’a-t-il pas fait ? C’est surtout le regret que nous avons exprimé en recevant la réclamation de M. Lenormant. Après cette justice rendue à nos compositeurs, nous en devons une autre au critique de M. Lenormant : c’est de ne pas laisser ignorer que, dans sa réponse à celui-ci, il abordait plusieurs points nouveaux assez vulnérables dans la thèse du docteur ès-lettres ; mais on comprendra que nous n’ayons pas été tentés de renouveler l’épreuve, comme aussi d’ouvrir la voie à d’autres réclamations. Il est probable d’ailleurs qu’après cette nouvelle polémique les bons latinistes auraient bien pu mettre les plaideurs dos à dos. Nous avons préféré, sans être de bons latinistes, prendre ce parti plutôt avant qu’après, à moins que les savantissimi doctores (on nous pardonnera cette inoffensive plaisanterie, bien permise d’ailleurs à l’ennui que nous a valu cette affaire) ne veuillent continuer le débat devant le prœses de Molière.


V. de Mars.