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on lit les œuvres de M. Paravia ; il est vraiment Italien à cet égard, et de la meilleure école, de celle qui croit avec raison que la langue d’un pays doit, autant que possible, s’en tenir à l’imitation des grands modèles nationaux ; aussi l’académie de la Crusca lui a-t-elle ouvert ses portes. L’autour des Lezioni du Storia subalpina est ce que les amateurs de la littérature facile appellent, par une dédaigneuse extension, un trecentiste, et par là il rend un service réel à son pays, en montrant combien il est profitable de rester fidèle aux saines doctrines littéraires. Le nombre des représentans de ces doctrines devient assez rare en Italie, comme partout ailleurs, pour que leurs travaux rencontrent au-delà même du pays qui les a vus naître l’attention reconnaissante et les sympathies de tous les amis des lettres.


F.-T. PERRENS.


Ce ne serait pas une histoire littéraire sans intérêt que celle de la petite contrée limitrophe de la France située au pied des Alpes. Profondément sympathique à sa grande voisine, la Savoie n’en a pas moins son individualité nationale très positive et très persistante. À la Savoie, la langue française dut son premier législateur, Vaugelas ; sa première académie, l’Académie Florimontane, fondée sous les auspices de saint François de Sales. Et depuis ce grand et aimable saint, qui fut aussi un remarquable écrivain, jusqu’à l’illustre auteur des Soirées de Saint-Pétersbourg et à son frère, le charmant auteur du Voyage autour de ma Chambre et du Lépreux, l’amour et la culture des lettres n’ont point manqué à la patrie de ces grands écrivains. C’est en Savoie aussi que s’est éteint prématurément l’an dernier un aimable et gracieux poète, Mlle Jenny Bernard. Tous les compatriotes de l’auteur et la plupart des étrangers qui ont visité la Savoie ont pu lire un recueil de poésies simples et doucement émues, où, sous le titre de Luth des Alpes, l’auteur décrivait avec une grâce pénétrante quelques-uns des plus beaux sites de la Savoie. Ceux qui ont rencontré l’auteur ont gardé vive souvenance de sa conversation, de quelques-unes de ses lettres si pleines de verve, où se mêlait tant d’esprit à tant de bonté, et dont une modestie sans apprêt augmentait le charme. Mlle Bernard a laissé de nombreux morceaux de prose et de poésie, connus seulement de ses amis, et qui demeurent entre des mains fraternelles et littéraires. Sans doute le dépositaire ne privera pas le public des derniers accens harmonieux de cette voix aimée.


F. DE SYON.


Nous avons déjà cité ici deux petits poèmes de M. Des Guerrois qui ont trouvé place plus tard dans un volume intitulé : Sous le Buisson. Aujourd’hui l’auteur prépare un volume nouveau, Paysages de Champagne, et il nous adresse deux pièces que nous croyons devoir publier comme un nouveau témoignage d’une inspiration qui, sous une forme parfois laborieuse, arrive à se traduire avec une certaine originalité. Il y a, ce nous semble, dans les vers de M. Charles Des Guerrois un assez vif sentiment de la nature et de la vie rustique. Le lecteur en jugera :

AVANT L’ORAGE

Il est dans la Bourgogne un usage que j’aime,
Un feuillet détaché du rustique poème.