Page:Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 7.djvu/853

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Cappello, qui devint duchesse de Toscane. On ne saurait louer assez le soin consciencieux que M. Paravia porte dans ses moindres travaux : des notes rejetées à la fin de chaque étude éclaircissent tout ce qui peut paraître obscur, et ces notes sont suivies, pour chaque auteur, d’une exacte bibliographie. Ce qui intéresse surtout dans ce recueil, c’est le récit des derniers jours de la république de Venise, d’après les souvenirs manuscrits du capitaine Paravia, qui a joué un rôle modeste, mais actif, dans ces événemens. Le lecteur français trouve avec plaisir des détails peu connus sur le séjour de Louis XVIII à Vérone et sur la conduite du général Bonaparte en Lombardie. S’il faut tout dire, il nous semble que M. le professeur Paravia traite un peu sévèrement les Français : ils sont pour lui des ennemis, non moins que les Autrichiens. N’eût-il pas dû reconnaître là, comme il le fait ailleurs, que les armées de la république et la vice-royauté du prince Eugène ont apporté le progrès à l’Italie du nord, maintenue plus tard dans la routine par la domination autrichienne ?

Un volume sur l’art de composer des inscriptions en langue vulgaire[1] suivit les Memorie Veneziane. Un volume sur ce sujet, cela peut, au premier abord, paraître un peu long, mais il faut dire que M. Paravia n’a consacré à l’épigraphie vulgaire que quatre leçons : si maigre que soit le sujet, il était difficile de le traiter avec plus de brièveté ; quant à l’à-propos, il ne saurait être contesté. C’est un préjugé encore répandu en Italie que les inscriptions doivent être écrites en latin ; M. Paravia combat dans une certaine mesure cette opinion trop absolue, et fait remarquer avec raison qu’à Pologne, par exemple, où elle règne eu maîtresse, on a soin d’écrire en italien tout ce qu’on désire faire comprendre. M. Paravia a donc fait une œuvre utile non moins qu’originale. Sans doute les préceptes qu’il donne pour écrire une bonne inscription sont un peu ceux du style en général, clarté, précision, brièveté ; mais il n’est pas sans intérêt de connaître les différentes abréviations, suppressions ou élégances qu’une épigraphe comporte. Le reste du volume n’est que l’exemple judicieusement joint au précepte. M. Paravia recueille cent inscriptions, funéraires ou autres, composées par lui avec beaucoup d’art. Sa supériorité dans ce genre est bien reconnue à Turin : c’est lui qui a été chargé des inscriptions nombreuses qui ornaient l’église pour les funérailles solennelles de Charles-Albert et de Gioberti, et pour le service funèbre des victimes de la bataille de Novare. Son talent a répondu à la confiance du gouvernement piémontais : on trouve tout ensemble dans ces épigraphes le sentiment national et le sentiment religieux.

En 1852 paraissaient les Lezioni di varia letteratura. Le titre de ce volume indique assez que M. Paravia n’a pas prétendu nous donner un cours complet de littérature italienne, ni même, comme M. Villemain, l’ensemble de ses leçons pendant une certaine période ; il s’est borné à choisir celles qui lui ont paru les mieux composées ou les plus intéressantes. Peut-être éprouverait-on quelque surprise en passant brusquement et sans transition d’un sujet à un autre, du général au particulier, si l’on voulait lire plusieurs leçons à la suite ; mais chacune, prise séparément, offre un véritable intérêt.

  1. Della Epigrafia volgare, 1850.