Page:Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 7.djvu/760

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui présentent des garanties de capacité et de richesse - tantôt le soin de faire rentrer les impôts, tantôt le service des paiemens : il afferme le produit des taxes, comme cela se pratiquait en France avant la révolution de 1789, et comme cela se pratique encore en Italie et en Espagne, ou bien il se repose sur une banque bien accréditée des opérations de trésorerie et du paiement des annuités qu’il doit à ses créanciers, — système dont l’Angleterre a donné l’exemple et qui a trouvé depuis bon nombre d’imitateurs. D’autres gouvernemens, et particulièrement ceux qui rattachent à une impulsion commune les divers rouages de l’administration, ont préféré recueillir directement par leurs agens le produit des taxes, et faire circuler par les mêmes canaux les fonds destinés à solder les dépenses de l’état : ceux-là entretiennent une véritable armée de receveurs-généraux et particuliers, de percepteurs et de contrôleurs, sans parler des ordonnateurs, des payeurs et des corps ou tribunaux qui président à la vérification des comptes ; c’est le système dont la France et la Prusse offrent le modèle le plus complet.

Mais, que l’on adopte l’un ou l’autre mode d’administration, le trésor de l’état, envisagé au point de vue de son action sur le pays, est une banque colossale qui reçoit chaque année des sommes importantes et qui les rend ensuite à la circulation par la rosée quotidienne des dépenses. Outre ces mouvemens de fonds, le trésor public est souvent dans le cas d’entreprendre les plus vastes opérations de crédit. Il n’y a pas de commerce ni d’industrie qui emprunte davantage ; ces emprunts sont représentés par des émissions de papier, titres de rentes pour la dette fondée, et billets de caisse ou bons du trésor pour la dette flottante. Les engagemens qui circulent ainsi avec la signature de l’état ne l’exposent pas à des remboursemens imprévus. La dette, en effet, est perpétuelle et s’amortit par des rachats partiels et successifs, ou bien elle a été contractée avec un terme fixe, et porte une échéance que l’on a dû calculer d’après les ressources éventuellement disponibles. On peut évidemment surcharger le marché des fonds publics et déprécier le cours de ces valeurs par des émissions de rente trop considérables ou trop fréquentes. Il arrive encore que l’on donne à la dette flottante des proportions excessives, que l’on émet des billets de caisse moins pour se procurer des avances sur la rentrée de l’impôt que pour couvrir un déficit périodique du revenu, et que l’on emprunte ainsi plusieurs centaines de millions, avec obligation de les rembourser dans un délai purement commercial, au maximum d’une année, au minimum de trois mois, en courant le risque de quelque crise financière ou politique dont le premier effet sera de retirer au trésor comme à toutes les banques