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pas ; mais enfin il revit l’Angleterre, où la fièvre le prit et ne le quitta pas d’un an et demi. Il n’avait pas recouvré ses forces, que déjà il prenait par la barbe, en pleine rue, un homme qui insultait un de ses amis, et il voulait lui donner une leçon à coups d’épée. Les lords du conseil le firent encore appeler, et lui recommandèrent la prudence, surtout dans l’état de faiblesse où l’avait mis sa longue maladie. C’est vers ce temps qu’il connut dans le monde sir George Villiers, depuis marquis et enfin duc de Buckingham. Ce personnage, qui commençait à faire grande figure à la cour de Jacques, lui témoigna beaucoup de bienveillance, et lui fit des offres de service. Herbert les accepta sans chercher à en profiter, et il attendit, son parlait rétablissement pour songer à quelque projet. Le premier qui l’occupa fut de lever deux régimens pour les conduire au service de la république de Venise ; mais, lorsqu’il fut question d’envoyer un nouvel ambassadeur en France, Villiers présenta une liste de dix-huit noms, parmi lesquels le roi choisit celui de sir Édouard Herbert. Ce choix fut approuvé par les lords du conseil privé. Il était si loin de s’y attendre, qu’ayant reçu l’ordre de se présenter devant eux, il leur fît dire qu’il allait dîner. L’ordre fut renouvelé, et il se rendit à Whitehall, demandant s’il avait commis quelque manquement dont il eût à se justifier. Ses duels jusqu’alors l’avaient seuls amené devant le conseil. Il y parut cette fois pour s’entendre annoncer qu’il était ambassadeur[1].


V

Sa mission avait pour principal objet le renouvellement de l’alliance entre les deux couronnes, et on lui donna pour ses frais de voyage 6 ou 700 livres sterling, qu’il eut à défendre la nuit suivante l’épée à la main contre une bande de voleurs furtivement introduite dans sa maison de la Cité. Peu s’en fallut qu’avant de partir il ne dût se mesurer avec sir Robert Vaughan pour quelques propos. Deux rendez-vous furent pris successivement. Il fallut que le roi chargeât le lord du sceau privé d’arranger l’affaire et de lui notifier qu’étant désormais revêtu d’un caractère public, il ne devait plus avoir de querelles particulières. Il aurait même été révoqué, si Buckingham n’eût répondu pour lui.

Dans son goût pour les détails, dès qu’ils touchent sa personne, il n’a pas négligé de nous dire que, comptant peu sur l’exactitude des paiemens de l’échiquier, il se mit en route avec de bonnes lettres de

  1. il est assez difficile de fixer l’époque de cette nomination d’après les mémoires de lord Horion, qui néglige fort les dates ; mais comme on sait d’ailleurs que sa mission a pris fin vers 1624, et qu’il dit dans la préface du De Veritate qu’elle a duré cinq ans, on peut en placer le commencement au plus tôt en 1618.