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Tu t’es appliquée encore à aigrir mon dépit, et même, au dernier instant, tu m’as refusé le baiser d’adieu.

Ne crois pas que j’aille me brûler la cervelle, si triste que puisse être mon destin ! Tout cela, ma douce belle, m’est arrivé déjà une fois.

LI.

Tes yeux sont des saphirs, tes doux yeux, tes yeux chéris. O trois fois heureux l’homme qu’ils saluent avec amour !

Ton cœur est un diamant d’où jaillissent de nobles éclairs. O trois fois heureux l’homme pour qui il brûlera d’amour !

Tes lèvres sont des rubis ; on n’en peut voir de plus belles. O trois fois heureux l’homme à qui elles feront l’aveu d’amour !

Oh ! si je le connaissais, cet heureux homme ; — oh ! si je le trouvais seul, là, bien seul au fond de la verte forêt, son bonheur ne durerait pas longtemps.

LII.

Avec mes discours amoureux, j’ai voulu surprendre ton cœur, et pris dans mes propres filets, je sens que la plaisanterie devient pour moi chose sérieuse.

Si maintenant, comme c’est ton droit, tu t’éloignes en te moquant, toutes les puissances de l’enfer s’approcheront de moi, et, sérieusement cette fois, je pourrais me faire sauter la cervelle.

LIII.

Le monde et la vie ne sont que des fragmens décousus ; je veux aller trouver un professeur allemand qui coordonnera tout cela, et en fera un système raisonnable. Avec sa robe de chambre et son bonnet de nuit, il bouchera les fentes de l’édifice.

LIV.

Vous avez ce soir une réunion brillante ; la maison est pleine de lumières. Là-haut, à cette fenêtre éclairée, je vois se mouvoir une ombre.

Tu ne me vois pas : je suis seul ici dans l’ombre au-dessous de toi. Encore moins pourrais-tu plonger tes regards au fond de mon sombre cœur.

Mon sombre cœur t’aime, il t’aime et il se brise ; il se brise et palpite et saigne… Mais tu ne le vois pas.


LV.

Je voudrais que toutes mes douleurs pussent se répandre dans un