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des différens âges et des chefs-d’œuvre de l’art plastique ; l’autre division est le bazar, l’exposition de l’industrie contemporaine montrant ses produits et les vendant. Parlons d’abord de la première partie ; aussi bien c’est celle qui attire le plus la curiosité.

Aucun peuple n’aime autant à voyager que le peuple anglais, aucun n’est à pareil degré dévoré de ce besoin de locomotion qui pousse l’Anglais hors de chez lui avec femme et enfans dès qu’il a mis de côté les fonds nécessaires au voyage ; mais comme la plus petite excursion sur le continent coûte de l’argent et du temps, les classes les plus nombreuses, tous les ouvriers, les artisans en général, peuvent rarement se donner cette satisfaction. Les constructeurs du palais de cristal se sont dit  : — Puisque le peuple n’a ni le temps, ni l’argent nécessaire pour aller visiter le monde, amenons le monde ici, en Angleterre, devant le peuple anglais, et procurons à nos concitoyens les moyens de plaisir et d’instruction dont ils ont été jusqu’ici privés. — Et cette pensée aussi généreuse que hardie a été mise à exécution avec une rapidité et un bonheur inoui. C’est donc le spectacle de la terre entière qui se déroule à vos yeux, non pas en peinture comme dans un panorama, mais en chair et en os, si je puis m’exprimer ainsi. Ici vous voyez, au milieu des arbres les plus rares et des fleurs les plus précieuses, originaires de chaque pays, les animaux qui vivent dans ces mêmes climats ; toutes les variétés différentes de la race humaine, depuis le Lapon jusqu’au nègre, depuis le Chinois et le Malais jusqu’à l’Indien d’Amérique, sont représentées par des figures faites avec la plus parfaite exactitude d’après le type ethnologique de chaque espèce. Pour ajouter à l’illusion, on a arrangé des groupes de manière à former des scènes animées, telles que chasses, réunions de tribus, intérieurs de famille ; vous pouvez, par exemple, assister au spectacle d’une chasse au tigre à des d’éléphant dans l’Inde ; au milieu d’épais maquis, l’éléphant, surmonté de sa tour garnie de chasseurs, repousse un tigre qui se jette sur lui ; du haut de l’éléphant des Indiens se battent contre le tigre à coups de fusil et de lances, d’autres chasseurs à pied lui jettent de loin des flèches. Ailleurs vous assistez à une de ces scènes de désolation des régions arctiques si bien dépeintes dans l’intéressant voyage du lieutenant Bellot  : au milieu d’une nature rachitique, entourée de glace et de neige, une famille de Lapons fait la cuisine, tandis qu’à quelque distance des phoques et des ours blancs s’observent mutuellement.

Des fontaines entourées des plus belles fleurs du monde, de gais parterres de plantes rares entretenues avec soin, sont placés de distance en distance dans la longueur de la nef. Cette vue réjouissante repose les yeux et l’esprit, et sert comme de transition et de séparation entre les diverses scènes qui devraient se passer à des