créé dans notre esprit des convictions que nous devons essayer de résumer. La plupart des jugemens qui ont été formulés sur Akbăr, comme fondateur de secte, portent l’empreinte des préjugés musulmans ou chrétiens, ou décèlent une ignorance plus ou moins complète des faits sur lesquels ces jugemens auraient dû reposer. Aucun reproche de cette nature n’est applicable à l’appréciation, si nette et si lumineuse en général, qu’Elphinstone nous a donnée de la réforme religieuse tentée par ce grand homme. Nous serions plutôt porté à croire qu’Elphinstone attribue à l’empereur moghol dans cette affaire une pureté d’intentions trop absolue, une absence trop entière de toute préoccupation vaniteuse, de toute prétention à des inspirations privilégiées. Une âme avide de tous les genres de gloire, comme l’était celle d’Akbăr, devait difficilement résister à la tentation d’imiter la Providence dans la direction spirituelle des peuples commis à sa garde, comme il s’efforçait de l’imiter dans la protection de leurs intérêts matériels. Elphinstone n’a pas tenu suffisamment compte de l’influence exercée sur les déterminations d’Akbăr par l’exaltation de ses idées, par le milieu superstitieux dans lequel il vivait, par l’habitude du pouvoir, enfin par l’admiration exagérée dont il était l’objet ; il n’a pas non plus envisagé, comme il aurait pu le faire, le côté politique de la question. L’auteur anglais remarque bien, il est vrai, que « la religion d’Akbăr était trop spirituelle et trop abstraite pour réussir avec les masses, et qu’elle mécontenta beaucoup de gens ; » il reconnaît qu’Akbăr s’était montré supérieur à tous les novateurs, ses devanciers, par sa conception de la nature divine, et que sa tolérance en matière de dogmes prouvait, dans un monarque absolu, une hauteur de pensée, une libéralité de vues bien extraordinaires pour l’époque et la race auxquelles il appartenait ; mais il ne déduit pas de ces faits les conséquences que nous nous croyons en droit d’en faire ressortir. En les combinant avec les considérations d’une autre nature que nous avons indiquées il y a un instant, on arrive à se rendre complètement compte des motifs qui ont déterminé le réformateur et du peu de durée des nouvelles institutions religieuses qu’il avait recommandées plutôt qu’imposées à ceux dont il prétendait changer les croyances.
Ce qui nous frappe dans cette conception mystique d’Akbăr, c’est qu’elle a été le résultat de la lutte qui s’était établie en lui entre le sentiment et la raison, entre l’instinct religieux et l’esprit philosophique. Nous le voyons avant tout sincèrement pénétré de la perfection, de la toute-puissance et de la bonté infinie du Créateur, et non moins sincèrement convaincu que les souverains doivent se considérer comme les délégués de Dieu sur la terre. Nous remarquons qu’arrivé à la maturité de son jugement et en possession de toute la