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se précipitent vers cette plaine admirable, ou celles qui ne demandent qu’à jaillir du sol, ce jour-là la Mitidja sera prête à recevoir 100,000 colons. Nous avons vu à Bouffarick des cultivateurs dont la fortune naissante n’a pour point de départ que trois hectare ». Les meilleurs tabacs et les plus beaux cotons de toute l’Afrique sont produits par la Mitidja : depuis le mûrier et l’olivier jusqu’au bananier et au bambou, toutes les plantations y réussissent.

Après la Mitidja, c’est la région de Tittery, puis le bassin du Chéliff, qui dans la province d’Alger appellent surtout les cultures. Toute la région dite du Tittery est particulièrement favorable aux plantations, surtout à la vigne et au mûrier, comme l’attestent les expériences faites dans les deux colonies agricoles de la banlieue de Médéah, Damiette et Lodi. Nous regrettons que les colons de ces deux villages n’aient pas tenté d’autres expériences agricoles, car, en dehors de la vigne et du mûrier, ils songent à tirer parti du voisinage de Médéah beaucoup plus que des terres mises à leur disposition.

C’est au territoire des Djemlel que la région du Tittery rejoint le bassin du Chéliff. Ce bassin, le plus riche certainement de toute l’Algérie comme il en est le plus étendu, s’ouvre d’abord une issue de trois lieues de large en moyenne entre la chaîne du Dahra au nord et la chaîne de l’Ouérenséris au sud, allant de l’est à l’ouest jusqu’aux limites occidentales de la province d’Alger, et de là, s’inclinent vers le nord par une large ouverture, il aboutit, à gauche, aux plaines arrosées par la Mina, à droite au littoral de Mostaganem. La disposition de ce bassin a fait songer à l’établissement d’un chemin de fer qui relierait Oran à Alger, et qui ne trouverait d’obstacle sérieux dans tout son parcours que la rampe du Contas et de l’Oued-Ger, défendant l’accès de la Mitidja.

Sous le nom de Chéliff de Milianah s’étend, depuis le territoire des Djendel jusqu’au pont d’El-Kantara, une plaine de quinze lieues de long sur quatre de large, qui offre un des plus beaux panoramas de toute l’Afrique. La ville de Milianah, adossée aux pentes méridionales du mont Zaccar, domine la plaine qui s’étend à ses pieds d’une hauteur de 300 mètres environ. Des flancs du Zaccar jaillissent deux sources abondantes, dont l’une, l’Oued-Boutan, fournit plus de 2 millions de litres d’eau par vingt-quatre heures. Ces sources tombent par cascades et semblent solliciter les usines et les fabriques ; en attendant, elles alimentent des vergers admirables qui s’étagent de coteaux en coteaux jusqu’au pied de la plaine, et changent les précipices en jardins verdoyans, pleins de citronniers, de figuiers et de frênes. Exposé au soleil du midi, tout cet amphithéâtre de verdure a des végétations exubérantes. Des hauteurs de Milianah, on voit se dérouler une surface plane de 45,000 hectares d’étendue, que le Chéliff traverse par le milieu, de l’est à l’ouest. Cette rivière, aux eaux inégales, ou bien inonde ses rives, ou bien les laisse absolument à sec, et lorsqu’elles auraient le plus besoin d’être humectées ; mais telle est la fécondité de ce sol admirable, où le soleil demande vainement que l’eau lui vienne en aide pour opérer des prodiges, telle, disons-nous, est sa fécondité, que la récolte y rend 50 pour 1 de la semaille.

La véritable métropole du Chéliff n’est cependant pas Milianah, c’est Orléansville, située au centre même de la vallée, à égale distance de ses deux débouchés