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effet que ces derniers pays auraient tout simplement des états provinciaux, le Danemark conservant d’ailleurs sa loi fondamentale, et qu’une constitution commune relierait ensemble les diverses parties de la monarchie danoise. Quelle serait cette constitution ? comment en outre serait-elle faite ? C’est ce qui s’est débattu depuis 1851, et il s’en est suivi des luttes fréquentes entre le ministère du roi Frédéric VII et les chambres de Copenhague, qui ont insisté à diverses reprises pour connaître les bases de la constitution commune, tandis que le cabinet refusait de les divulguer. Ou soupçonnait le gouvernement de vouloir agir par sa propre autorité, et c’était justement à quoi s’opposaient les chambres danoises, en invoquant la constitution de 1849. À mesure que les circonstances se développaient, les manifestations de l’opinion publique se succédaient en faveur de cette loi fondamentale ; mais elles ont été sans résultat. La constitution nouvelle, s’étendant à tous les états de la monarchie danoise, a été promulguée par ordonnance le 26 juillet.

Tout l’édifice du 20 juillet repose sur la création d’un sénat ou conseil de l’état chargé de connaître de toutes les affaires communes à la monarchie, c’est-à-dire au Danemark proprement dit, aux duchés et aux possessions danoises. Ce conseil devra co-exister avec le Folkething et le Landthing siégeant à Copenhague et représentant le royaume, avec les états du Slesvig, avec les états du Holstein, avec ceux du Lauenbourg, avec l’assemblée des îles Fœroër [Laugthing) et celle de l’Islande (Althing). La monarchie danoise n’aura donc pas moins de huit assemblées politiques pour deux millions et demi d’habitans ! — Examinons si du moins la constitution commune du 26 juillet est assez fortement construite pour retenir ensemble toutes ces parties.

Aux termes des articles 21, 22 et 23, le nouveau conseil a voix délibérative pour établir, modifier ou supprimer tout impôt commun à la monarchie, et pour contracter tout emprunt public. Son concours est seulement consultatif pour toutes les autres affaires communes. Des 50 membres qui le composent, 20 sont nommés par le roi, 18 par les chambres danoises, 5 par les états du Slesvig, 6 par les états du Holstein, et 1 par les états de la noblesse et les communes du Lauenbourg. Or il est facile de comprendre, à la première vue, que l’action de la loi nouvelle dépendra de la fermeté ou de la faiblesse de la diète du royaume. Si les chambres de Copenhague refusent d’abandonner leur influence sur les affaires communes à toute la monarchie, sur l’armée, la flotte, la conscription, elles tiendront en échec le nouveau sénat ; et pour le budget, puisque la diète possède légalement le droit de voter les trois cinquièmes du budget de la monarchie, il s’en suit évidemment que les deux autres cinquièmes seront par elle fixés d’avance. D’ailleurs, les articles 21 et 23 dépendant de l’acceptation des chambres de Copenhague, que deviendra la nouvelle charte, si elles répondent par un refus.

Le ministère a déclaré la constitution du 26 juillet immédiatement exécutable pour les duchés, et il espère que les chambres danoises, qui doivent s’assembler en octobre, mutileront elles-mêmes la loi fondamentale de 1849 pour l’adapter aux dispositions du nouvel acte. Qu’arrivera-t-il cependant si la diète de Copenhague refuse son assentiment à la constitution commune ?