Page:Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 6.djvu/870

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

connaître ses conditions et de se prêter à la conclusion d’un armistice. La note collective et le protocole explicatif furent adoptés par la conférence le 5 décembre. Ce jour-là, la politique autrichienne fit un grand pas ; elle s’était unie à l’Occident pour bien des éventualités.

Tandis qu’à Vienne on attendait le sort qu’aurait à Constantinople l’œuvre de la conférence, on y discutait une question de forme sur laquelle l’Autriche fit aussi à la France une concession importante. Comment la réponse de la Porte à la note collective de la conférence serait-elle transmise à Pétersbourg ? Y serait-elle envoyée directement et simplement par le ministre d’Autriche qui avait reçu les ouvertures de la Russie ? Serait-elle accompagnée d’un acte approbatif de la conférence ? La question était importante, car elle tendait à faire reconnaître par la Russie le caractère officiel et en quelque sorte l’autorité arbitrale de la conférence de Vienne. M. de Buol tint d’abord pour le premier système, mais il finit par céder. Il fut arrêté que la conférence consignerait la réponse de la Porte dans une note collective, et qu’elle chargerait M. de Buol, comme dépositaire des premières ouvertures de la Russie, de porter cette note à Pétersbourg. Les choses en étaient là, quand les nouvelles de Constantinople vinrent un moment désappointer les espérances de M. de Buol sur le sort de son œuvre. Par un de ces contre-temps qui ont fourmillé dans la question d’Orient depuis une année, il était arrivé que les ambassadeurs à Constantinople avaient poursuivi auprès du divan un travail analogue à celui qui avait occupé la conférence de Vienne. Pour ne pas troubler et compromettre leur négociation, les ambassadeurs à Constantinople avaient cru devoir s’abstenir de remettre à Rechid-Pacha la note collective de la conférence. Il y avait là, on en conviendra, de quoi inquiéter le ministre d’Autriche et piquer même l’amour-propre légitime de M. de Buol, président de la conférence, instituée précisément pour concentrer la haute direction des négociations et en réunir tous les fils. Cependant le résultat fut le même. La note de Rechid-Pacha, qui contenait les conditions auxquelles la Porte offrait de traiter, arriva à Vienne. La première condition de la Porte était l’évacuation des principautés. À ce prix, elle consentait au renouvellement de ses anciens traités avec la Russie ; quant aux privilèges religieux, elle adresserait à la Russie, comme aux quatre puissances, les firmans rendus par le sultan à ce sujet, accompagnés d’une note identique. Elle demandait en outre que le traité de 1841 fût confirmé et complété de manière à placer la Porte « dans le cercle d’une sûreté collective, » et à la comprendre dans le concert européen. Ces bases furent examinées et approuvées par la conférence, et sa résolution fut consignée le 13 janvier dans un protocole