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LA MARQUISE DE SABLÉ




III.

Cependant les années s’écoulaient, et Mme de Sablé s’avançait vers le terme inévitable, parmi les occupations que nous venons de retracer, les soins de sa santé, ceux de son salut, la multitude de petites affaires qu’elle prenait sur elle pour obliger tout le monde, surtout la correspondance étendue qu’elle entretenait avec sa famille et ses nombreux amis.

Cette correspondance est le seul monument qui reste des quinze ou vingt dernières années de sa vie. On ne saurait dire tout ce qu’elle embrasse, à combien de choses et de personnes elle touche. On y voit d’abord tout Port-Royal, Antoine Arnauld, Pascal, Domat, d’Andilly, l’abbé de Saint-Cyran, assez médiocre neveu d’un grand homme égaré par l’esprit de système, l’intrépide et obstiné Pavillon, évêque d’Alet ; Henri Arnauld, le frère de l’illustre docteur, évêque d’Angers ; Gilbert de Choiseul du Plessis-Praslin, le frère du maréchal de Praslin, d’abord évêque de Comminges, puis de Tournay, prélat savant et modéré ; Sainte-Marthe, et bien d’autres encore de la grande famille janséniste ; à côté d’eux, des ecclésiastiques d’un tout autre caractère, l’abbé de La Victoire, plus occupé de littérature que de théologie et connaissant mieux Cicéron[1] que saint Augustin ;

  1. On trouve de sa main la traduction de bien des lettres de Cicéron dans le tome V des portefeuilles de Valant. Sur l’abbé de La Victoire, voyez Tallemant, t. II, p. 330.