le sectaire ? Croit-on que ce soit uniquement une pieuse ferveur ou le besoin de l’activité, ou même l’instinct de la guerre, n’est-ce pas plutôt un calcul de haute ambition qui le pousse dans la sanglante voie où Jules César a instruit tous les grands usurpateurs à chercher le pouvoir suprême ? Les yeux toujours ouverts sur Londres, sur Westminster, sur les partis et sur le peuple, il ne manque ni à une campagne, ni à une bataille. Si la scène stratégique parait petite, si les journées de Naseby et de Marston-Moor, si les expéditions d’Ecosse et d’Irlande sont peu de chose auprès de la conquête des Gaules ou de la première campagne d’Italie, l’homme cependant pense et agit comme le héros d’Alize et de Munda, comme le vainqueur d’Arcole et de Rivoli. Il suit naturellement leur trace sans se proposer leur exemple, et l’austère puritain tout aussi bien que ces ambitieux de mœurs faciles, que ces mondains de génie, marche délibérément à la puissance par la gloire.
Nous ne raconterons pas la guerre où tombèrent à peu de jours de distance Hampden et Falkland, deux nobles adversaires regrettés de tous, honorés par l’histoire, et dont les statues rivales s’élèvent dans le vestibule du nouveau palais des deux chambres de parlement : mais nous suivrons Cromwell dans les luttes de la politique. Ces luttes, on en refera l’histoire sans l’avoir lue, si l’on se rappelle que le conflit est entre un roi et une assemblée, — un roi hautain, imprudent, obstiné, impérieux, mais inactif et stérile, toujours aussi surpris qu’indigné des événemens, embarrassé d’un parti qui, pour l’imprévoyance, ressemble à une cour et déteste les révolutions sans les comprendre, — une assemblée énergique, convaincue, mais divisée, préférant d’instinct la modération à la violence, téméraire par ses passions plus que par ses vues, intraitable et provocatrice par confiance dans sa force, désirant la paix au fond sans vouloir par honneur ni savoir par indécision faire les concessions nécessaires à la paix, entraînée par de noirs soupçons et de légitimes ressentimens, retenue par la crainte des excès et du désordre, enfin rêvant de gouverner parlementairement la guerre civile. La majorité s’y divise entre ces deux partis inévitables en de semblables crises, et qu’on pourrait appeler le parti libéral et le parti révolutionnaire. Le premier est celui des presbytériens, des auteurs de la pétition de droit, de ces réformistes politiques, vrais ancêtres de la tribu des whigs ; le second, plus démocratique, plus impétueux, plus rude, est ce parti qui prend ses passions pour règle, qui ne connaît pas de principe supérieur à sa cause, qui met à s’y dévouer toute sa vertu, et regarde le mépris des objections et des scrupules comme une condition de l’héroïsme. C’est le parti qui fait réellement les révolutions, qui les conduit à la victoire et à leur perte. En 1642,