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Knox fut intolérant ; mais sommes-nous ici-bas pour tolérer ou pour combattre ? Il voulait la théocratie ; mais au fond tous les réformateurs la veulent. A-t-on peur que le monde soit trop divin ?

À mesure que l’on avance dans les temps modernes, l’art d’écrire, aidé de l’art d’imprimer, prend une telle influence, qu’une nouvelle forme de l’héroïsme devient possible. Le grand homme écrivain, le héros homme de lettres a été et sera dans l’avenir une haute puissance. Il est comme l’âme de tous ; il aperçoit et manifeste, comme dit Fichte, l’idée divine du monde, le sens intime que Dieu a mis dans les choses. Plus puissant que les universités, que la chaire, que la tribune, il est par la presse un pouvoir, un quatrième pouvoir, le premier de tous. Mais la condition des hommes de lettres dans la société est si précaire et si fausse, qu’ils peuvent facilement être atteints de cette paralysie morale qu’on appelle le scepticisme. Le scepticisme a été le fléau du XVIIIe siècle. Il a rendu plus difficile aujourd’hui que jamais le métier de héros. Il a enfanté cette doctrine funeste qui rapporte tout à l’utilité, comme si le monde n’était qu’une machine à vapeur. La révolution française et le chartisme procèdent de lui.

M. Carlyle voudrait voir dans Goethe le héros homme de lettres par excellence ; mais en attendant l’avenir, qui seul pourra le juger, il choisit dans le dernier siècle, pour modèles de la cinquième forme de l’héroïsme (on va se récrier), Johnson, Rousseau et Burns. L’empire que Rousseau exerça sur la révolution française expliquerait assez le choix de son nom ; mais la sincérité de Johnson dans sa foi littéraire, mais l’ardeur passionnée qui aurait pu faire de Burns un Mirabeau, et qui ne lui a inspiré que de vives ou touchantes ballades populaires, ne suffisent pas pour motiver la préférence que M. Carlyle accorde à l’un et à l’autre. Il est vrai que nous n’avons pas une juste idée de l’influence exercée sur l’esprit anglais par le docteur Johnson.

La dernière incarnation du héros, c’est le roi. La royauté, c’est le commandement. Celui qui commande est l’homme habile, le plus habile ; il résume tous les héroïsmes. Lorsque cette supériorité véritable manque par trop au chef officiel du gouvernement, l’édifice perd son aplomb, il croule, et le jacobinisme triomphe. Il y a un droit divin dans le pouvoir, ou du moins il faut qu’il y soit, et quand il n’y est plus qu’en apparence, les révolutions éclatent. La révolution française renouvelée, continuée par celle de juillet, a été une vraie, mais terrible apocalypse. Elle a annoncé à tous les faux semblans, à toutes les routines, à toutes les choses spécieuses et inconsistantes que leur arrêt de mort était écrit dans le ciel. Une telle révolution n’est que la transition du faux au vrai. Pareille transition ne semble pas favorable à la venue des héros, car tout grand homme