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l’humanité tout entière. C’est vers ce double but que la science s’est frayé des routes nouvelles en recherchant désormais dans l’histoire des rois et des dynasties bien moins l’enchaînement des faits biographiques que la détermination des causes qui ont amené le progrès ou le déclin des races. L’origine de ces races diverses, la marche des principales d’entre elles au travers du globe, leurs divergences d’un même point de départ, leurs rencontres, leurs luttes, leurs alliances, leur fusion plus ou moins intime dans de certaines circonstances, tels sont les points de recherche, d’analyse et de discussion qui se présentent à la nouvelle école historique. — Quand on a eu l’occasion d’observer de ses propres yeux les caractères que présentent certaines agglomérations humaines et d’en étudier le détail, on n’a pas tardé à se convaincre qu’il n’est point de question ethnographique véritablement isolée. L’étude de la plus humble race intéresse en fait l’histoire de quelque grande famille humaine, et par suite l’histoire de l’humanité. Ainsi l’étude des races hymalayiennes nous fait remonter à l’histoire de ces hordes guerrières qui ont planté leurs étendards sur les murs de Pékin, de Dehly, de Vienne et de Moscou ; ainsi nous sommes amenés à comprendre dans la grande famille mongolienne ou tourânienne (une des branches du grand tronc scythique) non-seulement les nomades de la haute Asie, Tourks, Mongols et Tangous, mais aussi (avec un grand degré de probabilité, si ce n’est avec une entière certitude) les Thibétains, les Chinois, les Indo-Chinois et les Tamouliens ou aborigènes de l’Hindoustan.

Les preuves de toute espèce qui ont servi à démontrer l’unité de la famille iranienne sont parfaitement applicables à la démonstration de l’unité de la famille tourânienne, et ici les difficultés, les contradictions apparentes sont beaucoup moindres que celles qui semblaient repousser le fait aujourd’hui admis, — que les Persans, les Hindous, les Germains, les Russes, les Anglais, les Irlandais, sont membres de la même famille, c’est-à-dire de la famille iranienne. Les premiers investigateurs ont beaucoup insisté sur les différences radicales des trois branches primitives du tronc scythique, tangouse, mongole et tourke ; mais les recherches modernes tendent à les concilier. Les rapports de langue sont encore liés contestables, mais les ressemblances physiques sont manifestes, et il est à remarquer que cet ensemble de traits caractéristiques se retrouve chez tous les aborigènes de l’Inde, en suite que l’on peut reconnaître un type quasi-scythique à toutes les peuplades tamouliennes, depuis le Cavèry et le Vaggarou dans le sud jusqu’au Cosi et au Bhagarati du nord, — physionomie décidément opposée à la figure caucasienne des Ariens de l’Inde ou Hindous. On peut donc regarder comme certain que les aborigènes de l’Inde sont tous venus du nord et du tronc