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inédits. Il put reconnaître combien il restait encore à faire pour éclairer l’histoire de Frédéric II dans ses rapports avec l’Europe et la papauté, et c’est de cette première recherche qu’est sorti le projet du livre qui nous occupe. Déjà dans le XVIIIe siècle, des savans allemands, Schmincke et Murh, avaient formé le plan d’un recueil dont l’objet était aussi la réunion des actes émanés de l’empereur Frédéric II. Ce recueil resta toujours à l’état de projet. Un savant napolitain, l’historiographe Danielo, reprit en sous-œuvre la pensée de Schmincke, mais la mort le surprit avant qu’il eut pu mener son travail à bonne fin, et de plus les papiers qu’il avait rassemblés furent dispersés à sa mort. Enfin en 1849, M. Bœhmer de Francfort fit paraître un Recueil d’actes impériaux dans lequel figure l’indication de plusieurs documens intéressans, relatifs à la maison de Souabe ; mais le recueil de M. Boehmer n’est qu’un catalogue fort exact et fort bien fait, qui ne contient point les textes. Quoique plusieurs fois tentée dans l’espace d’un siècle, cette œuvre, toujours interrompue, va enfin recevoir une entière exécution. Trois volumes qui déjà paru, et comme les matériaux sont complètement réunis, il ne reste aucun doute sur l’entier achèvement du livre.

M. Huillard-Bréholles dit avec raison que les pièces diplomatiques sont la base de l’histoire, et que, lors même qu’une époque ou un personnage ont fourni le sujet de monographies justement estimées, c’est encore rendre service à la science que de rassembler les matériaux où les écrivains ont puisé, en ajoutant ce qu’ils ont omis, ou ce qu’ils n’ont point connu ; et comme l’une des conditions des plus essentielles des grands recueils de pièces, c’est d’être aussi complets que possible, le savant éditeur a reproduit par des analyses sommaires les documens déjà publiés et imprimé textuellement les actes qui, jusqu’à ce jour, étaient restés inédits dans les divers dépôts scientifiques de l’Allemagne, de l’Italie, de l’Angleterre et de la France. Ainsi disposés par ordre chronologique, ces actes s’éclairent l’un par l’autre ; l’histoire se déroule dans la forme la plus sévère, la plus exacte ; ce sont les morts eux-mêmes qui parlent, et le lecteur, transporté en plein XIIIe siècle, entend comme l’écho lointain de tous les bruits qui retentissaient dans les vastes domaines du César germain. De semblables travaux demandent de la part de ceux qui ont le courage de les entreprendre autant de savoir que d’abnégation ; et nous ne faisons que rendre ici à M. Huillard-Bréholles une justice bien méritée, en disant que le recueil dont il poursuit la publication avec une si infatigable activité est sans contredit l’une des œuvres les plus importantes que l’érudition française ait produites dans ces dernières années.


Catalogue d’une précieuse collection de livres, manuscrits, autographes, dessins et gravures[1].

Il existait autrefois en Europe une classe d’hommes tout à fait exceptionnelle, qui appartenait, à la fois à l’industrie et à la science, et qui les servait dignement l’une et l’autre par une infatigable activité. Cette classe, envers laquelle l’histoire des lettres, du reste, n’a point été ingrate, c’était celle des imprimeurs et des libraires érudits, qui, non contens d’éditer des livres, savaient aussi en écrire eux-mêmes ; et qui, à défaut d’ouvrages originaux, mettaient leur gloire à tirer de l’oubli

  1. Bibliothèque de M. Ant.-Ang. Renouard. Paris, 1853, 1 vol. in-8o.