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dans cette vaste série de leçons où se trouvent agitées les questions les plus diverses de la philosophie, celles que j’ai entendues, et qui ont été publiées sous le titre d’Introduction à l’histoire de la philosophie. Tous ceux qui ont assisté aux leçons de 1828 en gardent un vivant et fidèle souvenir. Jamais en France l’enseignement philosophique ne s’était montré avec autant de splendeur et de majesté. Le sujet choisi par le professeur n’était rien moins que l’histoire abrégée de la pensée humaine depuis l’origine des temps historiques jusqu’à nos jours. Le professeur reparaissant dans sa chaire après plusieurs années de silence. Deux mille auditeurs se pressaient dans la salle de la Sorbonne. M. Cousin avait mis à profit les longs loisirs que lui avait faits le ministère Villèle, et l’attente de son auditoire ne fut pas trompée. Il entreprit de raconter, tout ce que l’homme avait pensé sur Dieu, sur la nature et sur lui-même, et ce récit, il sut l’animer et lui donner un intérêt presque dramatique.

Il y a dans cette Introduction à l’histoire de la philosophie une partie toute nouvelle, qui n’avait jamais été abordée en France avant les leçons de 1828 : je veux dire la partie orientale, qui éclaire d’un jour singulier toute la philosophie grecque. Il s’agissait de démontrer que l’esprit humain, sur tous les points du globe où la civilisation s’est développée, a passé par les mêmes épreuves. En d’autres termes, le professeur voulait prouver que les évolutions de la pensée humaine se réduisent à quatre dans l’Inde comme en France, dans la partie des brahmanes comme dans la patrie de Voltaire, à savoir : le spiritualisme, le sensualisme, le scepticisme et le mysticisme. Cette Proposition, qui n’a rien d’inattendu pour ceux qui ont étudié avec attention les lois générales de l’intelligence, n’avait jamais été présentée avec autant d’évidence et de clarté. Mettant à profit les beaux travaux de Colebrooke sur la philosophie indienne, M. Cousin initiait son auditoire à la connaissance de l’Orient. J’abandonne à des juges plus habiles et plus compétens la discussion des questions posées et résolues par M. Cousin dans son Introduction de l’histoire de la philosophie ; je m’en tiens au côté purement littéraire de ce livre. Or il abonde en qualités qui méritent d’être signalées. Les problèmes les plus difficiles, les plus ardus, y sont exposés avec une netteté parfaite, et la lumière, distribuée d’une main généreuse, permet à tous esprits attentifs de suivre sans effort la pensée humaine jusque dans ses aberrations les plus étranges. C’est déjà sans doute un mérite considérable, mais ce n’est pas le seul qui recommande l’Introduction à l’histoire de la philosophie. Il n’y a pas une page de ce livre qui ne soit vibrante et colorée, sans que jamais l’éclat des images enlève rien à la précision de la pensée : talent rare et singulier. Les questions les plus abstraites, qui, par leur nature même, semblent