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nous offre le tableau fidèle des résultats de l’astronomie au milieu du XIXe siècle. L’histoire des sciences nous a transmis cet acte remarquable de l’astronome Ptolémée d’Alexandrie, qui consacra, par des inscriptions gravées sur les parois intérieures d’un temple, les résultats de sa longue carrière d’observateur des mouvemens célestes. L’ouvrage de M. de Humboldt est aussi la consécration de toutes les conquêtes de la science, mais gravée dans un temple bien plus impérissable que ceux d’Egypte, dans la typographie, l’une de ces supériorités des peuples modernes sur ceux des siècles passés. On a reproché au Cosmos un peu de confusion dans sa richesse, mais des tables analytiques très détaillées facilitent les recherches, ou bien aident ceux qui ont lu l’ouvrage à le considérer au point de vue dont ils ont besoin. Ainsi le physicien, le géographe, le métaphysicien, le théologien, le philosophe, le poète même, le consulteront aisément en ce qui les intéressera. Il y aura des oracles pour tout le monde. Le Cosmos était un des ouvrages d’astronomie ou plutôt le seul des ouvrages d’astronomie moderne que citât M. Arago. Il rendait pleine justice aux efforts que son illustre confrère avait faits pour donner aux amis de la science des résultats positifs, exacts, clairement énoncés et tout à fait à jour pour la science la plus moderne. Nous nous bornerons à cet éloge de l’ouvrage de M. de Humboldt. Plus on feuillette cette riche collection de découvertes qui honorent l’esprit humain, plus on acquiert soi-même de notions importantes, et plus on peut atteindre d’aperçus nouveaux. Le Cosmos, comme tous les bons livres, vaut par ce qu’il est et par ce qu’il fera faire aux autres.

M. de Humboldt, suivant ses propres expressions, considère la France comme sa patrie adoptive. Ce n’est pas seulement en effet comme savant ou comme écrivain national (car la plupart des ouvrages de M. de Humboldt sont en notre langue) que l’illustre octogénaire a droit au titre de citoyen français. Dans des temps de calamités tristes à rappeler, on l’a vu accourir à la suite de l’invasion étrangère et protéger contre le pillage et la spoliation notre Jardin des Plantes et tous nos établissemens scientifiques, se montrant bien plus dévoué à la France que bien des Français d’alors. Espérons que l’illustre savant viendra encore une fois recueillir à Paris les témoignages de gratitude et de sympathie de la génération scientifique actuelle, à laquelle il a servi de guide et d’exemple, comme il servira de modèle aux amis des sciences d’observation. Sous ce point de vue, comme sous beaucoup d’autres, l’auteur du Cosmos restera, suivant l’expression de Pline, le savant qu’on ne pourra jamais assez louer. Nunquam satis laudatus.


BABINET, de l’Institut.