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Maëlma, car on a donné une ferme aussi à ce dernier village, construit par le colonel Marengo, mais dans le système de colonie militaire du maréchal.

Saint-Ferdinand, plus éloigné encore qu’Ouled-Fayet de ses débouchés, plus avancé dans la région aride et sauvage de cette crête, plus isolé de tout mouvement et de toute ressource, était aussi dans une situation plus précaire. Sa ferme (la Consulaire), un moment occupée, se trouvait abandonnée sans avoir jamais produit l’effet voulu. Des 51 concessionnaires qui avaient primitivement peuplé ce village et son hameau, le Marabout d’Aumale, 25 étaient partis, 8 nouveaux étaient survenus; mais, par suite d’autres mutations, le nombre total se trouvait, en 1847, réduit à 29. Sur ce nombre, il n’y avait, il est vrai, que deux célibataires; tous les autres avaient une famille. Les colons travaillaient avec peu de courage, rebutés sans doute par les mauvaises conditions dans lesquelles ils étaient placés, et qui avaient fait émigrer la moitié d’entre eux. Ils n’avaient encore rien ajouté aux défrichemens qu’ils trouvaient tout faits en prenant possession de leur maison de 1,500 4rancs, et que le maréchal lit agrandir par les soldats au mois de mars 1847. L’intention sur laquelle reposait le système du colonel Marengo, c’est-à-dire celle de former une colonisation qui, composée de gens possédant un petit capital, pût se soutenir par elle-même, était complètement trompée. Pendant les quatre premières années (de 1843 à 1847), l’administration avait fourni aux colons leurs semences, qu’ils s’empressaient de vendre au lieu de les mettre en terre. Pour arrêter ce commerce, M. Cappone, gendre du colonel Marengo et maire de Saint-Ferdinand, prit le parti de ne distribuer les semences qu’au fur et à mesure des labours exécutés. Les colons de Saint-Ferdinand n’avaient du propriétaire que la prétention de ne vouloir pas travailler pour autrui, ce qui, comme on vient de le voir, ne les rendait pas plus actifs à travailler pour eux-mêmes. M. Cappone et le colonel Marengo avaient seuls accompli sur cette terre ingrate des prodiges d’industrie et de persévérance. Les résultats obtenus n’étaient cependant pas encourageans[1]; mais il faut tenir compte de la nature sauvage et dure de ces terres, calcinées depuis des siècles par un soleil dont la broussaille ne les défend pas, balayées chaque année par des pluies torrentielles qui en emportaient l’humus et ne cessaient

  1. Voici un tableau résumant les frais et les produits de diverses récoltes sur un hectare de terrain à Ouled-Fayet :
    FRAIS DE CULTURE DE 1 HECTARE 6 ARES DE TERRE FORTE ENSEMENCÉE EN BLÉ LE 10 DÉCEMBRE 1847 ET RÉCOLTÉE l’ANNÉE SUIVANTE.
    Deux labours 60 fr. « c.
    Hersage 12 »
    Semence (2 hectolitres à 25 fr. 60 c. l’un) 51 20
    Engrais (en pains d’huile de lin) 82 »
    Sarclage 10 »
    Moisson 32 »
    Battage (au fléau) 56 85
    Transport à Alger de dix quintaux métriques de paille longue 15 »
    Total des frais 319 fr. 05 c.