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géologie, de minéralogie, de botanique, d’histoire des animaux, qui semblent appartenir à la géographie ordinaire d’exposition ou à l’histoire naturelle. Ces notions, fort intéressantes en elles-mêmes, sont écrites d’un style si clair et si élégant, qu’il serait injuste de ne pas reconnaître qu’aucun autre ouvrage n’a aussi bien traité ces déductions de la science comparée. Voici un fait important qui ressort de l’énumération des espèces végétales et animales de chaque localité : c’est que, parmi toutes les acclimatations possibles, un très petit nombre a déjà eu lieu, et nous croyons qu’il n’existe aucune autre preuve plus forte de l’état tout à fait moderne de la surface actuelle de notre globe. Avant Lucullus, la cerise était inconnue, dans l’Europe occidentale ; l’abricot et la canne à sucre sont venus avec les croisades, la pomme de terre sous Louis XVI, presque à la fin du siècle dernier. On m’objectera qu’un célèbre écrivain fait, sous Louis XIV, dévaster par un sanglier un champ de pommes de terre : à cela je réponds qu’à l’imagination tout est permis pour faire de la couleur locale ; mais ce chapitre des anachronismes botaniques nous mènerait trop loin de la géographie physique.

On aura dans le quatrième volume du Cosmos de M. de Humboldt un volume consacré uniquement à cette branche spéciale de la géographie. Le mérite de cet ouvrage pourra être différent de celui de Mme Somerville, mais il ne détruira pas la valeur du livre de la savante et modeste Anglaise. Il y a quelque chose de plus précieux qu’une pièce d’or, ce sont deux pièces d’or. Nous avons dit que, sous la pression non pas du temps, mais de l’espace, et par l’introduction de descriptions d’histoire naturelle locale, qui serviraient utilement de conclusion aux cartes physiques de l’atlas de Johnston, plusieurs parties de la Géographie physique avaient été réduites à un simple sommaire insuffisant. La théorie de l’arc en ciel est de ce nombre ; l’auteur, qui est une mathématicienne de premier ordre, semble ne pas savoir tout ce que les travaux analytiques de l’illustre Airy et les expériences de MM. Galle, Miller, etc., ont ajouté à la théorie de ce brillant météore. Il en est de même de l’heureuse explication de l’anthélie due à M. Bravais. Toutefois, nous le répétons, dans le cadre trop restreint de deux petits volumes, comment renfermer des matériaux qui en exigeraient au moins le double ? La Géographie physique de Mme Somerville vaut par ce qu’elle contient, sans préjudice de ce qu’une revue attentive, des progrès de la science pourra introduire dans une nouvelle édition. Celle-ci est déjà la troisième, et certes une et même plusieurs réimpressions attendent encore cet intéressant et consciencieux ouvrage.


BABINET, de l’Institut.