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Amérique même, où la race anglo-saxonne semblerait devoir être acclimatée dès longtemps, la vie moyenne est bien moins longue qu’en Europe, et l’on a expliqué, d’une manière à mon gré assez contestable, l’audace américaine et le génie entreprenant de la nation en remarquant que sur un nombre d’hommes égal aux États-Unis et en Europe, il y a bien moins de vieillards dans le Nouveau-Monde que dans l’ancien. Au reste, là comme ailleurs, c’est le fait qui est tout, et quand un résultat est bien constaté, les raisonneurs ne manquent pas pour démontrer après l’événement qu’il devait en être ainsi.

Voilà donc déjà cinq circuits océaniques, savoir : deux dans l’Océan Atlantique, deux dans l’Océan Pacifique et un cinquième dans la mer des Indes. Si l’on y ajoute deux petits circuits qui contournent les glaces du pôle sud et celles du pôle nord par les deux mers glaciales, on aura un ensemble complet de sept courans de circulation pour toutes les mers du monde. La circulation des eaux chaudes et des eaux froides, l’influence de ces courans sur la navigation, sur la poche, sur la santé des équipages, font de l’étude de ces circuits une partie importante de l’art nautique, dont les travaux du lieutenant américain Maury ont avancé la connaissance ; mais il nous est impossible de ne pas remarquer que c’est à M. Duperrey, de l’Institut de France, qu’est due la première carte d’ensemble des courans du globe, carte d’après laquelle nous avons nous-même établi les sept circuits océaniques déjà mentionnés. Pour finir par un exemple de l’influence des courans, si nous supposons un voyageur qui se rend des Antilles à la Jamaïque, il mettra autant de semaines pour son retour de la Jamaïque aux Antilles qu’il a mis de jours pour son voyage des Antilles à la Jamaïque.

La question de l’irrigation du globe, que nous choisissons après celle des courans et des circuits océaniques, est plutôt une question d’atmosphère qu’une question relative à la météorologie des eaux. Nous allons suivre la marche de ce précieux élément, pour parler le langage de l’antiquité, depuis la surface des mers d’où il s’exhale sous forme de vapeur jusqu’à son arrivée sur le continent, où il se condense en pluies et en neiges pour couler ensuite au travers des continens sous forme de rivières et de fleuves et revenir enfin aux mers d’où il tirait son origine, après avoir servi à l’irrigation des contrées peuplées, aux communications commerciales, et même comme moteur mécanique, dans diverses applications de la force à l’industrie. Pascal appelait les rivières navigables, parcourues à la descente, des chemins qui marchaient. Dans les rivières à marées, par exemple dans la Seine, de Rouen au Hâvre, le chemin marche alternativement dans les deux sens, circonstance que les peuples envahisseurs de cette partie de la France, peuples à la fois guerriers,