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quand on veut les destiner à la consommation en nature. Pour la fabrication de l’huile, on les laisse sur l’arbre jusqu’à ce qu’ils aient pris une teinte noire et luisante. Dans les districts où la production est considérable, on ne les ramasse qu’au fur et à mesure du besoin des fabriques, l’olive conservant sur les branches tous ses principes huileux, évalués à 25 pour 100 de son poids.

Les huileries ne fonctionnent qu’une partie de l’année, à dater du mois de novembre. La durée de la campagne, qui dépend de l’abondance des récoltes, se prolonge en certains districts six ou sept mois. À Aix, elle ne dépasse jamais 40 ou 50 jours. Ces ateliers, une fois ouverts, n’interrompent plus leur marche ; les ouvriers y sont partagés en deux relais qui se relèvent de trois heures en trois heures, mode vicieux de diviser le temps qu’il est désirable de voir changer. On n’éprouve point dans les huileries, comme dans les fabriques de garance, l’incommodité de la chaleur et de la poussière ; mais les vêtemens des travailleurs et les travailleurs eux-mêmes sont constamment imprégnés d’huile. Le salaire, qui se paie à la fin de la campagne, monte dans la ville d’Aix de deux à trois francs par journée. Ce chiffre ne suffit pas toujours pour allécher les ouvriers des environs ; on est souvent obligé de recourir encore ici aux bras des montagnards.

Les produits des fabriques d’huile sont de divers genres et réclament plus ou moins de soins. Contrairement à la règle ordinaire en industrie, les meilleurs articles, ceux qui se vendent le plus cher sont ceux qui nécessitent le moins de main-d’œuvre. Ainsi on obtient l’huile vierge, c’est-à-dire l’huile de première qualité, en écrasant et en pressant légèrement les fruits. Pour la seconde qualité, il faut reprendre les olives déjà pressurées, les imbiber d’eau bouillante, enfin les soumettre à une seconde et très forte pression. L’huile qu’on en fait sortir, dite huile échauffée, est la marchandise de grande consommation[1]. Le travail ne s’arrête pas là : après avoir séparé de l’eau l’huile qui surnageait à la surface, le résidu liquide contient encore de nombreuses molécules huileuses, et d’un autre côté, il reste des matières grasses assez abondantes dans la pâte des olives. Ce sont les ouvriers des huileries mêmes qui, à l’aide de divers procédés, tirent des liquidés les dernières parties utiles qu’ils renferment, et en composent un produit exclusivement employé à l’éclairage. Quant à la pâte des fruits écrasés, elle est portée dans des ateliers spéciaux appelés ressences, où, après avoir été délayée et pressée de

  1. L’huile d’olive a quelquefois le goût du fruit : cela ne tient pas à la fabrication, mais au sol même. Les olives de certains districts laissent leur goût à l’huile, tandis qu’ailleurs elles n’ont pas cette propriété.